<304>rendrai pas indigne de votre amitié. Le sort en est jeté, je saurai en soutenir toutes les rigueurs; aussi bien suis-je déjà assez endurci contre ses coups.
Quelque douleur que m'ait causée votre gracieuse lettre par les violents combats qu'elle est venue renouveler en moi, je sens que je n'en suis que plus pénétré de la généreuse et touchante bonté avec laquelle vous daignez vous intéresser à mon sort et entrer dans ma situation. Et que vous dirai-je de la charmante Épître qui l'a suivie de si près? Je sens qu'elle est bien au-dessus de mes éloges, et qu'elle m'aurait attendri, même quand je n'aurais pas été l'heureux mortel à qui elle était adressée.
Je viens de me rendre à Lübben, d'où j'espère aller au premier jour me jeter aux pieds de mon auguste ami, et épancher dans son sein tous les sentiments qui font palpiter le mien toutes les fois que je réfléchis aux bontés et aux faveurs inestimables dont il daigne me combler. Je ne suis pas en peine, monseigneur, de vous faire alors approuver les raisons qui m'ont engagé à ne point refuser l'emploi qu'on veut bien me confier; et V. A. R. se persuadera facilement, à ce que j'espère, lorsqu'elle sera instruite de tout, que mon inviolable attachement pour elle y a au fond plus de part qu'elle n'a pu se l'imaginer.
J'ai enfin l'honneur d'envoyer à V. A. R. la fin de la traduction de la Métaphysique de Wolff, si tant est qu'un tel ouvrage, fait en plus grande partie si fort à la hâte, mérite le nom d'une traduction. Elle serait parfaite, si mes forces avaient répondu à mon zèle, car je les y aurais employées toutes, comme je n'en épargnerai jamais aucune, aussi souvent qu'il s'agira de vous prouver, monseigneur, à quelque prix que ce soit, que jamais homme ne pourra plus que moi vous être attaché et dévoué par devoir, par inclination et par reconnaissance, etc.