<12>Malgré la longueur de cette lettre, je ne puis la finir sans marquer à V. A. R. combien je suis flattée de penser que les affaires de ma maison qui m'appellent ce printemps en Flandre me rapprocheront des États du Roi votre père, et pourront peut-être me procurer le bonheur d'assurer moi-même V. A. R. des sentiments de respect et d'admiration avec lesquels je suis, etc.

6. A LA MARQUISE DU CHATELET.

Berlin, 23 janvier 1739.



Madame,

Je serais inexcusable d'avoir critiqué quelques endroits de votre excellent ouvrage sur le feu, si ce n'était vous qui aviez désiré de savoir mes sentiments. Novice en physique, il y aurait eu beaucoup d'amour-propre et de présomption à toucher aux ouvrages des maîtres de l'art. Je suis si persuadé qu'il n'y a que la modestie et la docilité qui puissent en quelque manière excuser l'ignorance, que je n'abandonnerai jamais ce retranchement, à moins que des raisons aussi fortes que vos volontés ne m'en fassent sortir. C'est cette même volonté qui m'oblige de vous dire, avec la franchise que votre mérite exige de moi, que j'ai quelque peine à me persuader qu'un vent donné puisse jamais causer un embrasement dans les forêts. Je suis en un pays, madame, où, pour mon malheur, je suis plus à portée de faire de ces sortes d'expériences. En automne et au commencement du printemps, nous avons des vents qui font assurément honneur à l'impétuosité de Borée, et il arrive fréquemment qu'ils déracinent des chênes qui paraissaient cramponnés pour jamais en terre, tant leurs racines étaient solides et profondes. Les pays plus voisins du nord ont des vents plus forts encore; mais il me semble qu'ils ne sauraient causer d'embrasement, à cause que l'écorce des arbres et la mousse qui y est attachée ne s'y prêteraient pas facilement.

Le désir de m'instruire ou la curiosité m'a fait interroger des