<153>Vous voulez que Jordan bavarde,
Et bavardons, puisqu'il le faut;
Le triste dieu d'ennui vous garde
De fréquent et pareil assaut!
On étourdit en Angleterre ces songe-creux par le bruit des cloches. Dieu veuille que mon babil vous amuse! J'aimerais presque mieux qu'il endormît V. M.; cela ferait du bien à sa santé, et je lui serais alors fort utile.
Quoi! votre esprit, occupé fortement
Des intérêts de Prusse et de l'Empire,
Lirait, comme un délassement,
Tout ce discours, qui tient fort du délire?
J'en suis, ma foi, très-fortement surpris.
Mais, dans le fond, peut-on si bien écrire?
Quand on n'a pas ce dont on est épris,
On ne saurait ni badiner ni rire.
D'ailleurs, j'ai perdu ma santé, et je suis condamné à boire trois bouteilles de tisane par jour pour la recouvrer. Est-il possible de faire des vers et d'avoir de l'esprit à ce prix-là? Je ne connais point le chemin qui conduit à la gloire, je le crains même par une poltronnerie réfléchie; mais ce que je sais bien, c'est que celui qui conduit à la santé est bien disgracieux.
Au diable soit Esculape et remède,
Et tout réparateur de l'humaine santé!
Ils minent par leurs soins ma chère humanité;
Je meurs en guérissant, si Dieu ne m'est en aide.
J'ai l'honneur d'être, etc.
100. A M. JORDAN.
Znaym, 8 mars 1742.
Cher Jordan, si je voulais vous faire un détail de tout ce qui se passe ici, je serais bien occupé, car nous avons de l'ouvrage au-