47. DE M. JORDAN.

Berlin, 17 mars 1741.



Sire,

La prise de Glogau a rempli de joie tout le public, et on attend, avec une impatience qui me fait plaisir, le détail de cette belle action dans les gazettes. Il n'est point de particulier qui n'y prenne part. Ce que l'on admire le plus, c'est qu'on ait pu arrêter le soldat, qui, dans de pareilles circonstances, a presque toujours le droit du pillage. Voilà les avantages réels qu'on retire de la discipline militaire de ce pays.

On se dit ici à l'oreille que la France déclare la guerre aux Hollandais. J'ai peine à le croire; cependant les oracles de la politique l'affirment, à ce qu'on prétend, et je m'en tiens sur ce sujet à la foi de mon curé.

On croit la paix sur le point de se faire, parce que le prince de Lichtenstein s'est absenté de Vienne, et qu'on soupçonne qu'il est allé au camp prussien pour déterminer V. M. à ne point écouter les propositions de la France, et à recevoir la Basse-Silésie, <97>que lui offre la reine de Hongrie, qui aspire à une alliance avec V. M., parce qu'elle la croit plus certaine et moins sujette à caution. Ce sont les raisonnements d'un nouvelliste qui, après maintes grimaces convulsives, accoucha hier de ce système.

Du Molard est allé à Paris attendre les ordres de V. M., par la crainte qu'il avait de ne pouvoir arriver sans la disette au point de l'érection de l'Académie.

J'ai la douce espérance de partir au milieu de la semaine prochaine pour aller me mettre aux pieds du conquérant de la Silésie.

J'ai l'honneur d'être avec un profond respect, etc.