<176>grand bien; sinon, je ne vois pas comment cette malheureuse guerre finira. Je suis avec la plus haute estime.
Madame,
de Votre Altesse
le fidèle cousin et serviteur, Federic.
13. A LA MÉME.
(Freyberg) 5 mars 1760.
Madame,
Vous interprétez si favorablement les explications dans lesquelles je suis entré, que je ne le puis attribuer qu'au support que vous daignez avoir pour mes faiblesses. Je conviens, madame, qu'il y a bien des choses à redire à cette lettre; mais songez qu'il a fallu la concerter, et que je ne suis que l'organe de ceux qui ont bien voulu consentir à cette démarche; cela donnera toujours lieu à quelque ouverture. La plus grande difficulté sera de faire parler ces gens. Ce qu'ils me font dire par V. sont des espèces d'énigmes. Je ne suis point Œdipe, et je crains quelque malentendu qui pourrait nous éloigner trop de notre compte. Il est sûr que la paix est fort à désirer. J'ai une perspective devant moi qui n'est guère riante, et j'aimerais autant nettoyer les étables du roi Augias que de courir d'un bout de l'Allemagne à l'autre pour m'opposer à la multitude de mes ennemis et essuyer peut-être encore de nouveaux malheurs. Mais il y a une certaine fatalité incompréhensible qui pousse les hommes, et qui, en combinant les causes secondes, les entraîne d'une manière irrésistible. Elle produit tout : quand nous voulons la paix, elle veut la guerre; elle guide l'aveugle, et égare l'éclairé. Il faut donc travailler autant qu'on peut pour le bien, sans s'étonner cependant s'il en arrive tout autrement qu'on ne l'avait prévu, car en vérité, madame, les plus profonds politiques n'en savent pas plus sur l'avenir que le