<318>ment les maux que je ne pouvais éviter. Adieu, mon divin marquis. Vous pouviez garder les ouvrages nouveaux de d'Alembert, qui en vérité sont du poids de notre monnaie courante. Je vous prie de bien conserver votre santé et de vous ressouvenir de vos amis, qu'un esprit malin lutine par le monde selon son caprice. Vale.

242. DU MARQUIS D'ARGENS.

Potsdam, 18 mai 1762.



Sire,

Me voici arrivé depuis hier dans le délicieux séjour de Sans-Souci, et j'y apprends aujourd'hui, par une lettre qu'on m'écrit de Berlin, que vous avez battu le corps du général Beck, et fait huit bataillons prisonniers. Vous traitez aussi mal les Autrichiens en Silésie que le prince Henri en Saxe. Voilà un bon commencement de campagne, et, si les choses qui, selon ce que je conjecture, doivent arriver au commencement du mois prochain ont lieu, je ne doute pas que vous ne revoyiez avant la fin de cette année les bords heureux de la Havel, et que vous ne veniez voir les superbes choses que vous avez fait faire à Sans-Souci, et que je considère toujours avec une nouvelle admiration. Tout est ici dans le plus bel ordre du monde. Battez donc pour l'amour de Dieu ces maudits Autrichiens le plus souvent que vous pourrez, pour que tous vos sujets aient à la fin le plaisir de vous voir heureux et content après tant de traverses.

J'ai eu l'honneur d'envoyer à V. M. les métaphysiques chimères de d'Alembert sur la poésie et sur l'histoire. Peut-on, avec autant d'esprit et de géométrie qu'en a cet homme, être aussi peu conséquent? Je crois qu'à la fin nos meilleurs écrivains diront comme le père Canaye : Point de raison, monseigneur! Que cela est sage! Point de raison!a

Voilà V. M. au milieu des fatigues et des dangers. Que je serai


a Voyez ci-dessus, p. 17.