<351>dont vous avez été servi quelquefois dans cette guerre, sans jurer plus que Belzébuth et toute la suite infernale? Je vois nombre de souverains, buvant, mangeant, dormant et ne faisant rien de mieux, servis avec le plus grand zèle; et vous, bataillant, souffrant le chaud et le froid, partageant toutes les fatigues de vos soldats et ne faisant guère meilleure chère qu'eux pendant toute la campagne, votre plus grande occupation est de réparer les fautes de ceux que vous comblez de biens. Je n'en dis pas davantage à ce sujet, car je ne veux pas reprendre la fièvre, et je ne puis y penser de sang-froid.

V. M. me fait trop de grâce et trop d'honneur de se souvenir de ma femme; je lui ai l'obligation, dans bien des occasions, de m'avoir rappelé à la raison, et elle a plus fait que toute ma philosophie, qui m'aurait souvent servi de peu, si les conseils de l'amitié ne lui avaient pas prêté une nouvelle force.

Je serais bien obligé à V. M., si elle voulait bien permettre que j'allasse boire douze bouteilles d'eau de Spa à Sans-Souci. On m'a ordonné de faire un peu d'exercice, pour redonner, s'il est possible, par le moyen de ces eaux un peu de force à mon estomac et à mes intestins. Je pense que le meilleur confortatif pour moi, après celui d'apprendre que V. M. jouit d'une bonne santé, sera la nouvelle de la prise de Schweidnitz; je l'attends avec la plus grande impatience, et je me flatte qu'il faut enfin que ce maudit commandant capitule, eût-il dans sa place saint Jean Népomucène et tous les saints autrichiens. Troie fut bien prise malgré Neptune et Apollon; ces dieux d'Homère ne valaient-ils pas mieux que tous ceux que font les papes? J'ai l'honneur, etc.

268. AU MARQUIS D'ARGENS.

Bögendorf, 26 septembre 1762.

Je vous dois sans doute bien des excuses, mon cher marquis, de vous avoir annoncé avec trop de présomption la fin de notre siége