<134>les efforts de l'Impératrice-Reine font que ses provinces enfantent des soldats. Les Hongrois se préparent à tomber sur la Haute-Silésie; les Saxons, dans les mauvaises dispositions que je leur connais, sont capables d'agir de concert avec les Autrichiens, et de faire une diversion dans mes pays héréditaires, à présent sans défense. L'avenir ne me présente que des perspectives funestes : dans une situation aussi critique, quoique dans l'amertume de mon cœur, je me suis vu dans la nécessité de me sauver du naufrage, et de gagner un asile. Si des conjonctures fâcheuses m'ont obligé de prendre un parti que la nécessité justifie, vous me trouverez toujours fidèle à remplir les engagements dont l'exécution ne dépend que de moi. Je ne révoquerai jamais la renonciation que j'ai souscrite des pays de Juliers et de Berg; je ne troublerai ni directement ni indirectement l'ordre établi dans cette succession : plutôt mes armes tourneraient-elles contre moi-même que contre les Français. On me trouvera toujours un empressement égal à concourir à l'avantage du roi votre maître, et au bien de son royaume. Le cours de cette guerre n'est qu'un tissu des marques de bonne volonté que j'ai données à mes alliés; vous en devez être convaincu, ainsi que de l'authenticité des faits que je viens de vous rappeler. Je suis persuadé, monsieur, que vous regrettez avec moi que le caprice du sort ait fait avorter des desseins aussi salutaires à l'Europe qu'étaient les nôtres.

Je suis, etc.

Voici la réponse du Cardinal :42



Sire,

Votre Majesté jugera aisément de la vive impression de douleur qu'a faite sur moi la lettre dont il lui a plu m'honorer, du 10 de ce mois. Le triste événement qui renverse tous nos projets en Allemagne, n'eût pas été sans ressource, si Votre Majesté eût pu secourir M. de Broglie, et sauver du moins la ville de Prague; mais elle n'y a pas trouvé de possibilité, et c'est à nous à nous conformer à ses lumières et à sa prudence. On a fait de grandes


42 20 juin 1742.