<80>et par toute l'Europe. Sur quelques propositions qui avaient été jetées en avant dans une lettre que le Roi avait écrite au roi d'Angleterre, ce prince avait répondu27 que ses engagements l'obligeaient, à la vérité, à soutenir l'indivisibilité de la succession de Charles VI, et qu'il voyait avec peine la rupture de la bonne intelligence entre les Prussiens et les Autrichiens; qu'il offrait cependant volontiers ses bons offices pour moyenner une réconciliation entre ces deux cours : il envoya le lord Hyndford comme ministre d'Angleterre, et le sieur Schwicheldt comme ministre de Hanovre. Ces deux négociateurs étaient, quoiqu'au service du même prince, chargés d'instructions toutes différentes. Le Hanovrien voulait qu'on achetât la neutralité de son maître en lui garantissant les évêchés de Hildesheim, d'Osnabrück et les bailliages qui lui sont hypothéqués dans le Mecklenbourg : on lui donna un contre-projet dans lequel les intérêts de la Prusse étaient mieux ménagés. L'Anglais offrait les bons offices de son maître pour engager la reine de Hongrie à la cession de quelques principautés de la Basse-Silésie : on éluda d'entrer sur ces points dans une négociation formelle, avant d'être préalablement instruit des dispositions où se trouvait la cour de Vienne. Ces ministres étaient dans le camp du Roi, et il paraissait singulier que le lord Hyndford donnât plus d'ombrage au sieur Schwicheldt que le maréchal de Belle-Isle, d'autant plus que ce Hanovrien recommandait sur toute chose qu'on fît un mystère de ses négociations au ministre d'Angleterre.
Ces Anglais et ces Hanovriens qui flattaient le Roi dans son camp, ne voulaient que l'endormir : ils n'en agissaient pas de même dans les autres cours de l'Europe. En Russie, Finch, ministre anglais, y soufflait la guerre; les intrigues du comte de Botta et les charmes du beau Lynar perdirent ce brave maréchal Münnich. Le prince de Brunswic, général en chef de la Russie, poussé par sa grand'mère, par l'Impératrice douairière, et par ces ministres étrangers, qui étaient autant de boute-feux, allait incessamment engager la Russie à déclarer la guerre à la Prusse. Les troupes s'assemblaient déjà en Livonie; le Roi en était informé, et c'est ce qui lui inspirait de la méfiance pour les Anglais,
27 Le 19 décembre 1740.