<XVII>inconsidérément une chose qui tournât à son plus grand préjudice, doit la tenir, puisque l'honneur est au-dessus de l'intérêt; mais un prince qui s'engage, ne se commet pas lui seul, sans quoi il serait dans le cas du particulier, il expose de grands États et de grandes provinces à mille malheurs : il vaut donc mieux, plutôt que le peuple périsse, que le souverain rompe son traité. Que dirait-on d'un chirurgien ridiculement scrupuleux, qui ne voudrait pas couper le bras gangrené d'un homme, parce que couper un bras est une mauvaise action? ne voit-on pas que c'en est une bien plus mauvaise de laisser périr un citoyen que l'on pouvait sauver? J'ose dire que ce sont les circonstances d'une action, tout ce qui l'accompagne et tout ce qui s'ensuit, par où on doit juger si elle est bonne ou mauvaise; mais combien peu de personnes jugent ainsi par connaissance de cause; l'espèce humaine est moutonnière, elle suit aveuglément son guide : qu'un homme d'esprit dise un mot, cela suffit pour que mille fous le répètent. Je ne saurais me refuser la satisfaction d'ajouter encore quelques réflexions générales ici, que j'ai faites sur le sujet des grands événements que je décris. Je trouve que les plus puissants États sont ceux où il y a plus de confusion que dans les petits; et cependant la grandeur de la machine les fait aller, et l'on ne s'aperçoit point de ce désordre domestique. J'observe que les princes qui portent leurs armes trop loin de leurs frontières, sont toujours malheureux, parce qu'ils ne peuvent point renouveler et secourir ces troupes aventurées. J'observe que toutes les nations sont plus valeureuses quand elles