<14>tous, de quelque religion et de quelque nation qu'ils soient; leur dessein est toujours de s'arroger une autorité despotique sur les consciences. Cela suffit pour les rendre persécuteurs zélés de tous ceux dont la noble hardiesse ose dévoiler la vérité; leurs mains sont toujours armées du foudre de l'anathème pour écraser ce fantôme imaginaire d'irréligion qu'ils combattent sans cesse, à ce qu'ils prétendent, et sous le nom duquel en effet ils combattent les ennemis de leur fureur et de leur ambition. Cependant, à les entendre, ils prêchent l'humilité, vertu qu'ils n'ont jamais pratiquée, les ministres d'un Dieu de paix, qu'ils servent d'un cœur rempli de haine et d'ambition.b Leur conduite, si peu conforme à leur morale, serait à mon gré seule capable de décréditer leur doctrine.
Le caractère de la vérité est bien différent. Elle n'a besoin ni d'armes pour se défendre, ni de violence pour forcer les hommes à la croire; elle n'a qu'à paraître, et, dès que sa lumière a dissipé les nuages qui la cachaient, son triomphe est assuré.
Voilà, je crois, des traits qui désignent assez les ecclésiastiques pour leur ôter, s'ils les connaissaient, l'envie de nous choisir pour leurs panégyristes. Je connais assez qu'ils n'ont que des défauts, ou plutôt des vices, pour me croire obligé en conscience à rendre justice à ceux d'entre eux qui la méritent. Despréaux, dans sa satire contre les femmes,a a l'équité d'en excepter trois dans Paris, dont la vertu était si reconnue, qu'elles étaient à l'abri de ses traits. A son exemple, je veux vous citer deux pasteurs, dans les Etats du Roi mon père, qui aiment la vérité, qui sont philosophes, et dont l'intégrité et la candeur méritent qu'on ne les confonde pas dans la multitude. Je dois ce témoignage à la vertu de MM. Beausobre et Reinbeck.b
Il y a un certain vulgaire, dans la même profession, qui ne vaut pas la peine qu'on descende jusqu'à s'instruire de ses disputes. Je leur laisse volontiers la liberté d'enseigner leur religion,
b Vertu qu'ils n'ont jamais pratiquée, et se disent ministres d'un Dieu de paix, qu'ils servent, etc. (Variante des Œuvres posthumes, t. VIII, p. 229.)
a Satire X, v. 43 et 44.
b Deux hommes qui méritent également le nom de célèbres. (Variante des Œuvres posthumes, t. VIII, p. 230.)