<84>vous donc pas à prétendre, vous qui êtes aussi fidèle au culte de la vérité que zélé destructeur des préjugés et de la superstition?
Vous vous attendez, sans doute, à recevoir par cet ordinaire tous les matériaux nécessaires pour commencer l'ouvrage auquel vous vous êtes proposé de travailler. Quelle sera votre surprise quand vous ne recevrez qu'une Métaphysique et des vers! C'est cependant tout ce que j'ai pu vous envoyer. Une Métaphysique diffuse et un copiste paresseux ne font guère de chemin ensemble.
J'ai lu avec beaucoup d'attention votre raisonnement géométrique et pressant sur les infiniment petits. Je vous avoue tout ingénument que je n'ai aucune idée de l'infini. Je crois que nous ne différons que dans la façon de nous exprimer. Je vous avoue encore que je ne connais que deux sortes de nombres, des nombres pairs et des nombres impairs : or, l'infini étant un nombre ni pair ni impair, qu'est-il donc?
Si je vous ai bien compris, votre sentiment, qui est aussi le mien, est que la matière, relativement aux hommes, est divisible infiniment; ils auront beau décomposer la matière, ils n'arriveront jamais aux unités qui la composent. Mais, réellement et relativement à l'essence des choses, la matière doit nécessairement être composée d'un amas d'unités qui en sont les seuls principes, et que l'auteur de la nature a jugé à propos de nous cacher. Or, qui dit matière, sans l'idée de ces unités jointes et arrangées ensemble, dit un mot qui n'a aucun sens. La modification de ces unités détermine ensuite la différence des êtres.
M. Wolff est peut-être le seul philosophe qui ait eu la hardiesse de faire la définition de l'être simple. Nous n'avons de connaissance que des choses qui tombent sous nos sens, ou qu'on peut exprimer par des signes; mais nous ne pouvons avoir de connaissance intuitive des unités, parce que jamais nous n'aurons d'instruments assez fins pour pouvoir séparer la matière jusqu'à ce point. La difficulté est à présent de savoir comment on peut expliquer une chose qui n'a jamais frappé nos sens. Il a fallu nécessairement donner de nouvelles définitions et des définitions différentes de tout ce qui a rapport avec la matière.
M. Wolff, pour arriver à cette définition, nous y prépare par