<238>Et, soutenant nos intérêts,
Faites surtout tomber Oreste. »
Le monstre partit à l'instant;
Et moi, soudain tressaillissant,
D'abord je m'éveille, et mon songe
Dans l'obscurité se replonge.

Voilà ce que je songeais dernièrement, et je pensais me ranger du parti de ces bons poëtes trépassés. Ils n'ont pas tort d'être de maumaise humeur : vous abusez trop étrangement du privilége de grand génie. Vous allez à la gloire par autant de chemins qui y mènent; vous me revenez comme ce conquérant qui croyait n'avoir rien fait tant qu'il restait encore une partie du monde à conquérir. Vous venez d'entamer les États de Molière; si vous le voulez fort, sa petite province sera dans peu conquise. Je vous remercie de ce nouvel Harpagon,a qui est selon moi une comédie de mœurs; si vous l'aviez faite plus longue, il y aurait eu apparemment plus d'intérêt.

Voyez combien je vous ménage : je ne vous importune point pour vous voir à présent; j'attends que Flore ait embelli ces climats, et que Pomone nous annonce d'abondantes moissons, pour vous prier d'entreprendre ce voyage : j'attends que mes lauriers aient poussé de nouvelles branches pour vous en couronner. Au moins souvenez-vous qu'après le duc de Richelieu, personne n'a des droits plus incontestables sur vous que votre tudesque confrère en Apollon. Vale.

256. DE VOLTAIRE.

Paris, 16 mars 1750.

Enfin d'Arnaud, loin de Manon,a
S'en va, dans sa tendre jeunesse,


a Voyez t. XI, p. 175.

a Voyez t. XIV, p. 110.