<263>ferez aucun plaisir de venir ici, et vous pouvez tout autant rester à Berlin.a

274. DE VOLTAIRE.

Février 1751.

Sire, je conjure Votre Majesté de substituer la compassion aux sentiments de bonté qui m'ont enchanté, et qui m'ont déterminé à passer à vos pieds le reste de ma vie. Quoique j'aie gagné ce procès, je fais encore offrir à ce juif de reprendre pour deux mille écus les diamants qu'il m'a vendus trois mille, afin de pouvoir me retirer dans la maison que V. M. permet que j'habite auprès de Potsdam. L'état où je suis ne me permet guère de me montrer, et j'ai besoin de faire des remèdes à la campagne pendant plus d'un mois. Permettez-moi de m'y aller établir la première semaine de mars, et de rester jusqu'au 5 ou au 6 mars dans votre château. C'est un homme assurément très-malade qui vous demande cette grâce. Songez aussi que c'est un homme qui n'a eu, en renonçant à sa patrie, que votre seule personne pour objet, et dont l'attachement ne peut être douteux. Puisque vous avez la bonté de me dire les choses qui vous ont déplu, cette bonté même m'assure que je ne vous déplairai plus. Il est bien sûr que je ne me suis pas donné à vous pour ne pas chercher à vous rendre ma conduite agréable, et que, quand on est conduit par le cœur, les devoirs sont bien doux.

Permettez-moi, Sire, de dire à V. M. que j'avais beaucoup connu Gross à Paris, qu'il m'était venu voir à Berlin, et que j'allai le prier de me faire venir un ballot de livres et de cartes de géographie que M. de Rasumowsky me devait envoyer. Je ne savais pas un mot de son rappel. Ce fut lui qui me l'apprit; et quand il m'en dit la raison, je me mis à rire. Je lui dis en vérité ce qui convenait, en pareille occasion, à un homme qui appre-


a Voyez t. XXI, p. 8, 13 et 14.