<227>sie; ce qui les a mis dans le goût des allégories.b Ils avouent que la porcelaine est trop fragile, et qu'il faudrait employer le marbre et le bronze pour transmettre aux âges futurs l'estime de notre siècle pour ceux qui en sont l'honneur.
Nous attendons dans peu la conclusion de la paix avec les Turcs. S'ils n'ont pas, cette fois, été expulsés de l'Europe, il faut l'attribuer aux conjonctures. Cependant ils ne tiennent plus qu'à un filet, et la première guerre qu'ils entreprendront achèvera probablement leur ruine entière.
Cependant ils n'ont point de philosophes (car vous vous souviendrez des propos que l'on tint à Versailles, en apprenant que la bataille de Mindenc était perdue); je n'en dis pas davantage.
J'ai lu le poëme d'Helvétius sur le Bonheur; je crois qu'il l'aurait retouché avant de le donner au public. Il y a des liaisons qui manquent, et quelques vers qui m'ont semblé trop approcher de la prose. Je ne suis pas juge compétent; je ne fais que hasarder mon sentiment, en comparant ce que je lis de nouveau avec les ouvrages de Racine, et ceux d'un certain grand homme qui illustre la Suisse par sa présence. Mais on peut être grand géomètre, grand métaphysicien, et grand politique comme l'était le cardinal de Richelieu, sans être grand poëte. La nature a distribué différemment ses dons; et il n'y a qu'à Ferney où l'on voit l'exemple de la réunion de tous les talents en la même personne.
Jouissez longtemps des biens que la nature, prodigue envers vous seul, a daigné vous donner, et continuez d'occuper ce trône du Parnasse qui, sans vous, demeurerait peut-être éternellement vacant. Ce sont les vœux que fait pour le Patriarche de Ferney le Philosophe de Sans-Souci.
b Fr. Nicolai, Nachrichten von den Künstlern, welche in und um Berlin sich aufgehalten haben. Berlin, 1786, in-8, p. 135, article Bornemann.
c 1er août 1759.