<70>dure, il ne restera de moi-même que la manie de faire des vers, et un attachement inviolable à mes devoirs et au peu d'hommes vertueux que je connais. Ma carrière est difficile, semée de ronces et d'épines. J'ai éprouvé de toutes les sortes de chagrins qui peuvent affliger l'humanité, et je me suis souvent répété ces beaux vers :b
Heureux qui, retiré dans le temple des sages, etc.Il paraît ici quantité d'ouvrages que l'on vous donne : le Salomon, que vous avez eu la méchanceté de faire brûler par le parlement;c une comédie, La Femme qui a raison;d enfin, une Oraison funèbre de frère Berthier.e Je n'ai à riposter à toutes ces pièces que par celles que je vous envoie, qui certainement ne les valent pas; mais je fais la guerre de toutes les façons à mes ennemis; plus ils me persécuteront, et plus je leur taillerai de la besogne. Et si je péris, ce sera sous un tas de leurs libelles, parmi des armes brisées sur un champ de bataille; et je vous réponds que j'irai en bonne compagnie dans ce pays où votre nom n'est pas connu, et où les Boyer et les Turenne sont égaux.a
Je serais bien aise de vous recevoir; je vous souhaite mille bonheurs; mais où, quand, et comment? Voilà des problèmes que d'Alembert ni le grand Newton ne sauraient résoudre.
Adieu; vivez heureux et en paix, et n'oubliez pas ceux que le diable ou je ne sais quel être malfaisant lutine, etc.
b Voyez t. XI, p. 53; t. XVIII, p. 128; et t. XIX, p. 213 et 272.
c Le Précis de l'Ecclésiaste et le Précis du Cantique des cantiques, par Voltaire, avaient été brûlés à Paris le 7 septembre 1759. Voyez ses Œuvres, édit. Beuchot, t. XII, p. 203 et suivantes.
d Voyez t. XI, p. 175.
e Voyez t. XIX, p. 175.
a Voyez t. XIX, p. 23.