<257>dans la maison duquel on m'a marqué beaucoup d'attention en Italie, m'a priée de lui faciliter le bonheur de voir le plus grand des hommes .....
172. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Le 8 septembre 1773.
Madame ma sœur,
Ce qui m'est le plus agréable de la lettre de Votre Altesse Royale, c'est que je juge, par la bonne humeur qui y règne, que vous êtes, madame, en parfaite santé. Divertissez-vous, madame, sur mon compte; mais portez-vous bien, c'est le principal. Non, madame, en vérité, j'en conviens de bonne foi, jamais prophète ne s'est avisé de prophétiser plus faux que je ne l'ai fait; je l'avoue, je le confesse, et je suis très-convaincu d'être le plus balourd de tous les voyants. Je pourrais avoir recours à des interprétations, avec quoi l'on rectifie telles sottises qu'on veut; mais je n'alléguerai point les crimes de la terre qui ont empêché l'Être suprême d'accorder la paix à l'Asie, qu'elle ne méritait pas. En attendant, V. A. R. a pris le sage parti de jouir du bon temps que le ciel nous accorde, et de partager ses jours entre les arts, la méditation, et la société. Que je suis malheureux de ne pouvoir assister à cette troisième partie de ses occupations! Les murs de Sans-Souci me retracent et me remettent les idées d'un bonheur dont j'ai joui, et qui s'est écoulé trop vite, mais dont la mémoire est gravée en mon esprit comme sur l'airain.
Pour moi, madame, je reviens d'un voyage assez fatigant, que j'ai expédié en trois semaines. La princesse d'Orange est heureusement de retour chez son époux; elle était enceinte en venant ici, et heureusement les chemins de la Westphalie ne lui ont fait aucun tort. Le comte Orologio a passé ici pendant mon absence, et est reparti avant mon retour; de sorte, madame,