<505>Colomb, qui se doutait de l'existence d'un nouveau monde, et qui laissa à d'autres la gloire de le découvrir.
Après un aveu aussi sincère, vous ne direz pas que des préjugés d'enfance m'ont fait embrasser la défense de la religion chrétienne contre le philosophe fanatique qui la déchire avec tant d'animosité. Souffrez que je vous dise que nos religions d'aujourd'hui ressemblent aussi peu à celle du Christ qu'à celle des Iroquois. Jésus était juif, et nous brûlons les juifs; Jésus prêchait la patience, et nous persécutons; Jésus prêchait une bonne morale, et nous ne la pratiquons pas. Jésus n'a point établi de dogmes, et les conciles y ont bien pourvu; enfin un chrétien du troisième siècle n'est plus ressemblant à un chrétien du premier. Jésus était proprement un essénien; il était imbu de la morale des esséniens, qui tient beaucoup de celle de Zénon. Sa religion était un pur déisme, et voyez comme nous l'avons brodée. Cela étant, si je défends la religion du Christ, je défends celle de tous les philosophes, et je vous sacrifie tous les dogmes qui ne sont pas de lui. Des prêtres ayant remarqué quel pouvoir leur crédit idéal leur donnait sur l'esprit des peuples, ils ont fait servir la religion d'instrument à leur ambition; mais si leur politique a défiguré une chose qui, dans son institution, n'était pas mauvaise, cela ne prouve autre chose, sinon que la religion chrétienne a eu le sort de toutes les choses humaines, qui se pervertissent par des abus. Quand on veut donc se récrier contre cette religion, il faut désigner les temps dont on parle, et distinguer les abus de l'institution. Mais quels que soient ses dogmes, le peuple y est attaché par la coutume; il l'est de même à certaines pratiques extérieures; qui les attaque avec acharnement le révolte. Que faut-il donc faire? Conserver la morale, et même y réformer ce qui est nécessaire; éclairer les hommes en place qui influent sur les gouvernements; répandre à pleines mains du ridicule sur la superstition; persifler les dogmes, éteindre le faux zèle, pour acheminer les esprits à une tolérance universelle : qu'importe alors à quel culte le peuple est attaché?
Après vous avoir dit de Dieu ce que j'en sais et ce que je n'en sais pas, je vous entretiendrai un moment d'une de ses images sur terre, de ce Louis XIV, trop loué pendant sa vie, et trop