56. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Dresde, 30 décembre 1765.
Sire,
Votre Majesté continue à me donner des louanges que je prends comme l'expression de sa politesse et de ses bontés envers moi. Mais je n'en mériterais pas la moindre partie, si j'avais la présomption de vouloir entrer en lice avec vous, Sire, sur quelque matière que ce soit, particulièrement dans la politique. Je m'en garderai bien, Sire, et j'aurai la prudence de ne pas toucher aux détails, au fond même des choses. Je n'ai prétendu qu'entamer des préliminaires avec V. M. et mettre l'affaire en négociation amicale, et je me fiais du succès sur la droiture de mes intentions et sur la connaissance que vous en avez, Sire. Je ne me suis point abusée; je vois déjà que j'ai réussi. V. M. va droit au but en parlant de nommer des commissaires. Tâchons de les choisir honnêtes et habiles; ils feront un bon ouvrage. Je vois aussi que nous convenons des principes. L'avantage commun doit être, comme vous le dites très-bien, Sire, la base et la règle d'une pareille négociation, et quant à la liberté du commerce, utile en général, je conviens avec vous, Sire, qu'elle a ses modifications, et ne peut exclure les règlements de police que chaque État juge à propos de faire pour la consommation intérieure.
J'ose promettre, Sire, que vous serez content de cette façon de penser, et qu'un règlement salutaire aux deux États s'ensuivra bientôt. Quelle satisfaction pour moi, si je puis me flatter de <104>l'avoir acheminée, si je vois que j'ai convaincu V. M. du désir que nous avons d'entretenir avec elle le meilleur voisinage! Ce sera bien le moyen de me procurer ces années heureuses que V. M. a la bonté de me souhaiter. Je la prie d'agréer de ma part des vœux également sincères. Jouissez, Sire, en parfaite santé de votre gloire et des fruits de vos travaux, et conservez vos sentiments d'amitié à celle qui sera constamment avec la plus haute considération, etc.