<335>Pères. Ce que vous me dites de vos conversations sur mon sujet avec Sa Majesté Impérialea me flatte et m'intéresse; rien ne peut être plus enchanteur pour moi que le souvenir de cette grande princesse, pour laquelle j'ai une vénération infinie. Je vous ai entretenu de ses talents, de ses grandes vues, de l'élévation de son âme, et de cette bonté avec laquelle elle accueille ceux qui ont le bonheur de l'approcher. Vous avez eu tout le temps de vous rappeler et de vérifier tout ce que je vous ai dit; je conçois aisément quels doivent être tous vos regrets, et que vous ne retrouverez nulle part rien qui puisse vous dédommager de tout ce que vous avez vu. C'est avec plaisir que je vous verrai à votre passage, et que je vous entendrai sur un sujet qui a tant de droits de m'intéresser. Sur ce, je prie Dieu, etc.

5. DU BARON DE GRIMM.

Paris, 19 mars 1781.



Sire,

Si j'osais vous fatiguer de mes lettres aussi souvent que le souvenir de vos bontés m'occupe et m'obsède, ma correspondance deviendrait bientôt le pain quotidien de Sans-Souci, et un monarque dont toute l'Europe respecte le repos, comme elle a admiré ses travaux, se trouverait exposé continuellement à un bavardage importun et interminable. Comment se peut-il donc que, avec de si belles dispositions, j'aie passé tant de mois sans écrire à V. M., sans porter à ses pieds l'hommage de ma reconnaissance, après la lettre remplie de bonté dont elle m'a honoré l'automne dernier? C'est que j'ai constamment observé qu'il n'y a que les grands hommes de vraiment oisifs dans ce monde, qu'il n'y a qu'eux qui aient le temps de faire des poëmes, de composer des brochures, de jouer de la flûte, comme s'ils n'avaient pas leurs


a Grimm était alors à Saint-Pétersbourg. Voyez les lettres de Frédéric à d'Alembert, du 16 décembre 1773 et du 11 mars 1774, t. XXIV, p. 682 et 689.