<523>laisser partir avec tout son mérite. Je conçois que nous ne trouverons peut-être pas mieux en France; mais ceux qui viendront le remplacer ne coûteront pas tant. et n'auront pas d'enfants, à ce que j'espère. Si Poitier veut, je lui promettrai de prendre ses enfants en service dès qu'ils seront d'âge, et de conserver sa pension au père, lors même qu'il ne sera plus en état d'aller.

Aujourd'hui j'ai exercé le premier bataillon, ce qui va fort bien. Nous avons ici une pécore qui se nomme le comte de Linange. Il ne peut être comparé qu'à nos goujats de l'armée du côté de l'esprit : je le mettrai dans l'olla de l'augmentation, où il servira de pièce de résistance, mais assurément pas d'épicerie.

Pöllnitz est malade; Fouqué boit du vin de Hongrie, et perd aux échecs; Keyserlingk boit de l'eau, et écrit des élégies à sa belle; le duca boite, joue, et craint la rhubarbe; et votre petit serviteur vous assure de toute son estime et de tout son attachement. Vale.

10. AU MÊME.

Potsdam, 17 août 1743.



Mon cher Rottembourg,

Je ne vous écris aujourd'hui que des coïonneries. Voici un morceau d'une lettre de Voltaire,b que je vous prie de faire tenir à l'évêque de Mirepoix par un canal détourné, sans que vous et moi paraissions dans cette affaire. Mon intention est de brouiller Voltaire si bien en France, qu'il ne lui reste de parti à prendre que celui de venir chez moi.

La seconde coïonnerie dont je vous entretiens est l'évasion du sieur Poitier de Berlin, avec la demoiselle Roland. Je vous prie de voir comme vous ferez à Paris pour remplacer ces deux sujets,


a Le Roi parle vraisemblablement du feld-maréchal Frédéric-Guillaume duc de Holstein-Beck, né en 1687, mort en 1749; il faisait partie de la société intime de Frédéric.

b Probablement celle du mois de juin 1743, t. XXII, p. 146-148.