<570>trouvèrent, au delà de tout ce feu, un terrible fossé qu'ils franchirent encore, au delà duquel, et dans leur flanc gauche, ils rencontrèrent de l'infanterie autrichienne, avec du canon, placée dans un autre fossé, dont le feu fut si fort, qu'il les força de se retirer sous notre protection. Personne ne les poursuivit, et je profitai de ce moment pour les replacer sur la montagne, derrière mon infanterie, où je les rangeai comme si c'était à une manœuvre.
La canonnade cependant ne discontinuait pas, et l'ennemi fit tous les efforts possibles pour tourner ma gauche d'infanterie. Je sentis le besoin de la soutenir, et j'y envoyai les deux derniers bataillons des vingt-quatre qui me restaient. Mais, pour faire bonne mine à mauvais jeu, je fis faire un tour à gauche à vingt-quatre bataillons de la première ligne; je remplis, faute de mieux, ce centre par mes cuirassiers, et je fis encore une seconde ligne du reste de ma cavalerie, qui soutenait mon infanterie. En même temps, toute ma gauche d'infanterie, marchant par échelons, fit un quart de conversion, prit la ville de Lowositz, malgré le canon et la prodigieuse infanterie de l'ennemi, en flanc, emporta ce poste, et obligea toute l'armée ennemie de s'enfuir.
Le prince de Beverna s'est si fort distingué, que je ne saurais assez vous chanter ses louanges. Avec vingt-quatre bataillons nous en avons chassé soixante-douze, et, si vous voulez, sept cents canons. Je ne vous dis rien des troupes, vous les connaissez; mais depuis que j'ai l'honneur de les commander, je n'ai jamais vu de pareils prodiges de valeur, tant cavalerie qu'infanterie. L'infanterie a forcé des enclos de vignes, des maisons maçonnées; elle a soutenu, depuis sept heures jusqu'à trois heures de l'après-midi, un feu de canon et d'infanterie, et surtout l'attaque de Lowositz, ce qui a duré, sans discontinuer, jusqu'à ce que l'ennemi s'est trouvé chassé. J'ai surtout eu l'œil à soutenir la hauteur de ma droite, ce qui, je crois, a décidé de toute l'action. Montrez, je vous en prie, le croquis ci-joint à Fouqué; s'il ne le voyait pas, il ne me le pardonnerait jamais.
J'ai vu par ceci que ces gens ne veulent se hasarder qu'à des affaires de postes, et qu'il faut bien se garder de les attaquer à
a Voyez t. IV, p. 94, 180 et suivantes, et t. V, p. 153 et 192.