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6. A LA PRINCESSE JEANNE-ÉLISABETH D'ANHALT-ZERBST.

Breslau, 14 mars 1758.



Madame ma cousine,

La lettre que Votre Altesse m'a faite, du 6 de ce mois, n'a pu que m'être fort agréable, parce que, outre la satisfaction que je ressens d'en recevoir de votre part, elle me fournit l'occasion de m'expliquer naturellement avec vous comme avec une amie bien estimée sur ce qui fait d'ailleurs le sujet de votre lettre.

Douterez-vous, madame, un moment des égards et de l'estime que je vous garde invariablement, après toutes les complaisances, si j'ose les citer, que j'ai toujours eues pour V. A.? Jamais je n'ai ressenti une plus grande satisfaction que lorsque j'ai pu vous en donner des témoignages, autant que cela a dépendu de moi.

L'affaire arrivée dernièrement au sujet du de Fraignea doit être envisagée comme un accident malheureux; mais je remets à votre pénétration et à votre discernement même s'il pouvait me convenir et si je devais voir avec indifférence qu'un étranger, dont je savais à n'en pas douter qu'il faisait le métier d'espion, restât à dos de mon armée pour avertir les Français et leur trahir tout ce qui se passait dans les quartiers de mes troupes. Voudrait-on attribuer aux Français ce qu'ils n'ont pas voulu s'arroger eux-mêmes, savoir, qu'ils sauraient établir de nouveaux usages à la guerre, contraires à ceux qui depuis tout temps ont été pratiqués? Et n'ai-je pas eu tout lieu d'être surpris, madame, de ce qu'on a voulu accorder gîte à de pareilles gens à la cour de Zerbst, et les protéger, malgré les réquisitions que je fis faire; ce qui me mit dans la nécessité de l'en faire partir de gré ou de force, afin de n'avoir plus derrière moi un homme si pernicieux, et au sujet duquel il faut indispensablement encore, pour ne vous rien cacher, que je le fasse garder quelque temps au moins, pour ne pas lui laisser le loisir d'exécuter ses mauvaises intentions, qu'il a fait éclater depuis longtemps contre moi. J'avoue que la protection


a Voyez t. IV, p. 178.