<544>sera impossible de bien finir la campagne. Mes compliments à tous nos blessés. Dites, s'il vous plaît, à Seydlitz que je souffre plus que lui : mon esprit est plus malade que sa main. Ma situation est sans cesse violente. Il n'y a plus d'honneur dans les troupes; le j...-f..... les a possédés presque tous; on ne sait à quel saint se vouer. Malgré tout cela, je fais bonne contenance avec mes coïons; mais je n'ose rien entreprendre d'audacieux avec eux. Je comprends très-bien que celle catastrophe n'a pas amélioré votre santé; mais il faut prendre sur soi dans ces occasions. Le mal qui nous accable n'est pas arrivé par votre faute; il ne faut donc pas vous en chagriner. Tout homme, pourvu qu'il vive, essuie des malheurs, et voit quelquefois, au travers de ces nuages, des rayons de bonne fortune; il faut supporter l'une et l'autre. Le bon temps, comme le mauvais, passe, et à la fin, notre terme nous conduit au tombeau. La vie est trop courte pour de longues afflictions. Voilà de la belle morale. Est-ce que je la pratique? Hélas! non; les premiers moments de la douleur sont trop violents; l'homme est plus sensible que raisonnable.a Soyez plus raisonnable que sensible, et rendez justice à l'amitié et à la tendresse avec laquelle je suis tout à vous.
14. AU MÊME.
Waldow, 10 septembre 1759.
Mon cher frère,
Depuis ma dernière lettre, Dresde a capitulé le jour que Wunsch a battu Maguire auprès des Scheunen. Wunsch de là est retourné à Torgau, que Saint-André voulait reprendre avec onze mille hommes qu'il a sous ses ordres; Wunsch l'a encore battu, lui a pris toutes ses tentes, marmites, havre-sacs et ustensiles de ce corps, avec trois cents prisonniers, six canons et quelques éten-
a Voyez t. XIV, p. 73; t. XVII, p. 173; t. XVIII, p. 181 et 208; t. XIX, p. 49; t. XXIV, p. 151, 167 et 531; t. XXV, p. 50 et 264.