3. AU MÊME.
Pogarell, 8 avril 1741.
Mon très-cher frère,
L'ennemi vient d'entrer en Silésie. Nous n'en sommes plus éloignés que d'un quart de mille.a Le jour de demain doit donc décider de notre fortune. Si je meurs, n'oubliez pas un frère qui vous a toujours aimé bien tendrement. Je vous recommande en mourant ma très-chère mère, mes domestiques, et mon premier bataillon. J'ai informé Eichel et Schumacherb de toutes mes volontés. Souvenez-vous toujours de moi, mais consolez-vous de ma perte; la gloire des armes prussiennes et l'honneur de la maison me font agir, et me conduiront jusqu'à ma mort. Vous êtes mon unique héritier; je vous recommande en mourant ceux que j'ai le plus aimés pendant ma vie, Keyserlingk, Jordan, Wartensleben, Hacke, qui est un très-honnête homme, Fredersdorf et Eichel, sur qui vous pouvez mettre une entière confiance. Je lègue huit mille écus que j'ai avec moi à mes domestiques; mais tout ce que j'ai d'ailleurs dépend de vous. Faites à chacun de mes frères et de mes sœurs un présent dans mon nom; mille amitiés et compliments à ma sœur de Baireuth. Vous savez ce que je pense sur leur sujet, et vous connaissez, plus que je ne saurais vous le dire, la tendresse et tous les sentiments de l'amitié la plus inviolable avec lesquels je suis à jamais,
Mon très-cher frère,
Votre fidèle frère et serviteur
jusqu'à la mort,
Federic.a
a Cette lettre rappelle les dispositions testamentaires de Frédéric, des années 1752, 1757, 1758, 1759, 1768 et 1769, imprimées ou citées t. IV, p. 295 et 296; t. VI, p. V, VI, et 243-248; t. XXV, p. 353 et suivantes.
a Voyez t. II, p. 80, et t. XVII, p. 107 et 108, no 49.
b Conseillers de Cabinet.