44. DU PRINCE DE PRUSSE.
Berlin, 27 août 1756.
Mon très-cher frère,
La lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire hier m'a mis au fait de la réponse de Vienne et de votre résolution. Je souhaite que votre santé et votre vie soient conservées. Voilà le principal article; votre esprit et la valeur des troupes feront le reste. Je me souviens que Montécuculi dit dans ses Mémoires que tout le mal qu'on prévoit à la guerre n'arrive pas, et que le bien qu'on espère manque de même souvent, en dépit des meilleurs <117>arrangements. Mais l'art consiste à trouver les moyens de redresser les choses par la force d'esprit, qui fait naître les moyens.135-b Voilà ce qui ne vous a jamais manqué, mon très-cher frère, et ce qui fait que l'armée sous vos ordres sera en sûreté, et assurera celle de l'État. Heureux si je puis contribuer par mon zèle au bien-être de la patrie et à votre gloire! Soyez persuadé, mon très-cher frère, que c'est le but où se borne mon ambition.
La Reine se porte bien; elle affecte de la fermeté, elle la soutient devant le monde; mais en particulier son cœur pâtit. Ma sœur fera venir le médecin,136-a et prendra toutes les précautions pour que sa santé soit conservée.
J'ai l'honneur d'être, etc.
135-b Voyez les Mémoires de Montécuculi. Nouvelle édition. Amsterdam et Leipzig, 1756, in-8, p. 81, chapitre IV, Des opérations, article I, De la résolution.
136-a Eller. Voyez t. XVI, p. XII, art. XI, et p. 197-201.