25. AU MÊME.
Ce 12 (avril 1761).
Mon cher frère,
Je suis bien aise de la confiance que vous avez prise en moi, et de ce que vous m'écrivez naturellement sur votre situation. Je vous répondrai de même, mon cher frère. Chacun rend justice dans l'armée à votre valeur et à la manière distinguée dont vous avez servi tant que votre santé vous l'a permis. Tout le monde sait que vous avez des infirmités qui vous empêchent de vous livrer aux fatigues comme autrefois. Ainsi, mon cher frère, vous pouvez être, de ce côté-là, très-tranquille, et ne vous point représenter des choses qui certainement ne sont point; car tout ce qui vous est arrivé est si évident et si connu de tout le monde, que la médisance et la malignité n'y trouvent aucune prise. Tout ce que j'ajoute à ceci n'est relatif qu'à des circonstances de famille qui méritent votre attention. La première est, mon cher frère, que le régiment vous appartient toujours, et que votre présence, ne fût-ce que pour peu de temps, inspire plus d'ambition aux officiers, principalement s'ils voient que vous distinguez les bons officiers des médiocres. La seconde chose regarde mon neveu; on a toutes les peines du monde de lui donner une certaine ambition, et s'il voit un de ses oncles qui quitte le militaire, il croira que c'est un exemple qu'il pourra suivre. Ainsi je vous prie de lui donner ce bon exemple, cependant en prenant tous ménagements, pour votre santé, convenables, et en vous fatiguant le moins que possible. Je vous parle, mon cher frère, du fond de mon cœur, et je vous dis sincèrement ce que je pense; faites <552>ce que vous pourrez sans vous incommoder. Pour notre neveu, enfin, que l'exemple de tous ses parents l'oblige à suivre la route que nous lui traçons. Je suis avec la plus tendre amitié, etc.