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252. A LA MÊME.

Ce 7 (février 1753).



Ma très-chère sœur,

Si j'avais la lyre d'Amphion, je l'enverrais aussitôt au Margrave, pour qu'il pût rebâtir son château à l'aide de ses sons harmonieux. Je lui envoie dans la place ce que j'ai : c'est une flûte qui a l'art d'adoucir le chagrin et de faire diversion aux malheurs qui nous arrivent. J'ai pris à la hâte sept concertos que j'y ajoute, et je continuerai chaque jour de poste à vous envoyer les autres. Voyez, ma chère sœur, jusqu'où va mon impertinence : j'ai ouï dire que le Margrave a perdu toutes ses chemises, et comme je crois qu'il ne trouvera pas sur-le-champ de la toile assez fine, j'ose vous en envoyer de Silésie, que j'ai justement trouvée sous ma main. Excusez ma hardiesse, et ne mettez le tout que sur l'envie que j'ai de vous servir. J'attends le retour du chasseur pour savoir en quoi je pourrai vous être utile, et j'espère que vous me parlerez avec toute la franchise qui doit régner entre amis. Tout ce qui me console dans ces tristes circonstances, c'est la façon généreuse dont vous avez pris le malheur qui vous est arrivé.a Je me flatte que votre santé n'en sera pas altérée; c'est pour moi le principal, car les pertes que vous avez faites, ma très-chère sœur, ne sont pas irréparables. Ce qu'il y a de plus fâcheux, c'est le dérangement que cela met à votre genre de vie. Mandez-moi donc et de votre bibliothèque, et de vos nippes, et de tout, ce que vous avez perdu, pour que je puisse au moins, de mon côté, porter quelque réparation à vos pertes. Si vous saviez de quel cœur je le fais, vous ne m'envieriez pas ce plaisir-là, et vous voudriez même y contribuer. Je suis avec la plus vive tendresse, ma très-chère sœur, etc.


a Voyez t. XXVI, p. 125.