<273>deux rives de son bord nous en rendaient l'approche difficile et meurtrière, à cause du nombre de pandours qui occupaient la plupart des gorges et des forêts de ses environs.
Ces raisons seules auraient suffi pour résoudre le combat; il y en avait encore de plus importantes. Il ne restait à la maison d'Autriche que l'armée de Daun; cette armée bien battue, la garnison de Prague était prisonnière de guerre, et il était à présumer que la cour de Vienne, se trouvant sans ressources, aurait été forcée de faire la paix. J'avais donc beaucoup plus à gagner qu'à perdre en risquant la bataille. L'exemple de grands généraux, des raisons de guerre qui étaient propres à la situation où je me trouvais, des raisons de politique aussi puissantes, surtout l'espérance de parvenir bientôt à la paix générale, tout enfin me portait à préférer aux résolutions timides le parti le plus généreux.
Le proverbe qui dit que la fortune seconde les audacieuxa est vrai pour la plupart du temps. Comme la bataille était résolue, je me proposais d'attaquer l'ennemi, parce que ce parti est toujours le meilleur. On ne savait pas où les Autrichiens étaient campés. J'étais sur le point de marcher vers Swoyschitz, lorsque je vis que l'armée autrichienne se déployait, et commençait à occuper ce poste. Ceci m'obligea de changer ma disposition, puisqu'une chaîne d'étangs et des défilés nous empêchaient de les attaquer dans ce camp. Nous marchâmes vers Planian; notre droite vint à Kaurzim, et notre gauche sur des hauteurs au delà du grand chemin qui de Böhmisch-Brod mène à Kolin. Le lendemain, nous marchâmes pour attaquer l'ennemi. Voici ma disposition et les raisons que j'eus de la faire telle. Les hauteurs que l'ennemi occupait formaient un angle; sa droite était sur des collines, mais elle n'était point appuyée; le centre se brisait, et la gauche formait la perpendiculaire dont la droite était la base, et le centre l'angle; devant la gauche et derrière l'armée se trouvait une chaîne d'étangs; le front du poste aussi bien que les hauteurs étaient bordés d'une grande quantité
a Le vieux proverbe, Fortes fortuna adjuvat se trouve dans le Phormion de Térence, acte I, scène IV, vers 26, et dans les Tusculanes de Cicéron, liv. II, chap. 4.