<160>onéreuses, elles pouvaient procurer une paix d'autant plus stable, qu'elle ne laissait ni semence d'animosité, ni de jalousie. Ces principes servirent de loi, et l'on verra dans la suite que, malgré les succès qui couronnèrent les entreprises de ce prince, il ne s'en départit jamais. Qui n'aurait cru que des propositions aussi raisonnables n'eussent été bien accueillies par le roi de Pologne? Il en fut tout le contraire cependant. Le comte Brühl n'avait que son projet en tête. Dans cette vue il avait fait revenir en Saxe le prince de Lorraine, dans l'intention de joindre cette armée à celle de Rutowski et au corps du comte de Grünne : fier de ce nombre, il se proposa de commettre le sort de son roi et le salut de sa patrie à la fortune d'un combat, sacrifiant ainsi tous les intérêts qui sont sacrés à la plupart des hommes, pour satisfaire sa vengeance particulière.

Villiers se rendit à la cour avec le visage d'un homme qui annonce une bonne nouvelle; il demanda audience, et ajouta aux propositions dont il était chargé, les exhortations les plus pathétiques, pour porter Auguste à éviter les malheurs qui menaçaient ses peuples et sa personne. Le Roi lui répondit sèchement qu'il aviserait à ce qu'il y aurait à faire. Brühl s'expliqua plus clairement avec le ministre anglais : il fit sonner fort haut le secours qu'il attendait des Russes; il parla avec emphase des grandes ressources de la Saxe, et finit par lui dire que, par déférence pour le roi d'Angleterre, il ferait délivrer au sieur Villiers un mémoire contenant les raisons auxquelles le roi de Pologne pourrait se résoudre à faire la paix. Le lendemain, 1er de décembre, le roi de Pologne partit pour Prague, et les deux princes aînés, pour Nuremberg. Quel contraste de hauteur et de faiblesse! Après le départ de la cour, un des conseillers saxons remit au sieur Villiers ce mémoire, qui contenait en substance : " Que le roi de Pologne accéderait à la convention de Hanovre, à condition qu'au moment même les Prussiens feraient cesser toute hostilité, n'exigeraient plus de contributions, bonifieraient celles qu'ils avaient reçues, évacueraient la Saxe sans plus différer, et payeraient tous les dommages avenus et à venir par la retraite des troupes. " Villiers augura mal d'une paix dont la Saxe dictait les conditions avec hauteur. Il envoya ce mémoire au Roi, en l'assurant des bonnes