<174>Si cette princesse y avait souscrit, toute son armée de Bohème se serait subitement tournée contre moi; ce ne sont pas là des moyens de paix. Je n'en ressens pas moins l'horreur du péril que vous courez; et rien n'égalera l'impatience de vous savoir en sûreté, et votre tranquillité fera la mienne. Votre Majesté est en force, et la terreur de nos ennemis, et a emporté sur eux des avantages considérables et glorieux; l'hiver avec cela, qui suspend les opérations militaires, suffisait seul pour la défendre. Qui est plus capable que Votre Majesté de se donner de bons conseils à elle-même? Elle n'a qu'à suivre ce que lui dictera son esprit, son expérience, et par-dessus tout son honneur. Quant aux secours, qui de ma part ne peuvent consister qu'en subsides et en diversions, j'ai fait toutes celles qui me sont possibles, et je continuerai par les moyens qui assurent le mieux le succès : j'augmente mes troupes; je ne néglige rien; je presse tout ce qui pourra pousser la campagne prochaine avec la plus grande vigueur. Si Votre Majesté a des projets capables de fortifier mes entreprises, je la prie de me les communiquer, et je me concerterai toujours de grand plaisir avec elle, etc.

Au premier aspect de cette lettre, elle paraît douce et polie : mais quand on considère les circonstances fâcheuses où se trouvait le roi de Prusse, et les différentes négociations avec la France qui l'avaient précédée, on y remarque un ton d'ironie d'autant plus déplacé, que l'on n'était pas convenu de remplir par des épigrammes les engagements réciproques contractés par le traité de Versailles. Dépouillons cette lettre de tout verbiage, et examinons ce qu'elle dit réellement : " Je suis fort fâché que vous ayez conclu le traité de Hanovre sans m'en avertir, car le prince de Lorraine reviendrait en Alsace, si la reine de Hongrie l'acceptait. Ne voyez-vous pas que la guerre d'Italie et de Flandre que je soutiens, est une diversion que je fais en votre faveur? car je n'ai nul intérêt à la conquête de la Flandre, et l'établissement de mon gendre Don Philippe en Italie me touche peu. Conti contient si bien les forces principales de la reine de Hongrie en Allemagne, qu'il a repassé le Rhin, laissé faire un Empereur à qui l'a voulu;