<20>le chemin de Londres, pour y faire à son parlement, dans une harangue pompeuse, le récit de ses exploits.
Pour se convaincre du peu de suite qu'il y a dans les actions des hommes, il n'y a qu'à faire l'analyse de cette campagne. On assemble une armée sur le Main, sans pourvoir à ses subsistances; la faim et la surprise obligent les alliés à se battre; ils sont vainqueurs des Français; ils passent le Rhin; ils vont à Worms; le Speyerbach les arrête, sans qu'ils trouvent des expédients pour en déposter les ennemis; ils avancent enfin sur le Speyerbach, que M. de Noailles leur abandonne, et ils ne reçoivent les secours des Hollandais que pour prendre des quartiers d'hiver dans le Brabant et dans la Westphalie. Rien n'est conséquent dans cette conduite : elle ressemble à l'opération d'un chimiste qui, cherchant la pierre philosophale, trouve une couleur dont il pouvait, se passer. Ce n'est point dans l'intention de critiquer la conduite du roi d'Angleterre que nous faisons ces réflexions, car bien d'autres généraux en ont fait autant, mais seulement pour convaincre les lecteurs que l'espèce humaine n'est pas aussi raisonnable qu'on voudrait le persuader.
Le peu de succès qu'eurent les Autrichiens et les Anglais dans cette campagne de 1743, donna aux Français le temps de se reconnaître et de prendre quelques mesures. Ils avaient à la vérité perdu la Bavière; mais leur amour-propre était flatté d'avoir empêché leurs ennemis de passer le Rhin et de pénétrer en Alsace.
Si la fortune changea souvent de parti dans cette guerre, l'intérêt ne changea pas moins la politique des souverains. Nous avons dit que le roi de Sardaigne avait signé le traité de Worms. Ce traité fut publié dans le temps même qu'il négociait encore avec la France et l'Espagne, et qu'on s'attendait à Versailles à recevoir d'un jour à l'autre des nouvelles de la conclusion du traité. Les ministres de Louis XV ne furent pas les maîtres de dissimuler leur ressentiment, et trouvant dans la conduite du roi de Sardaigne des marques de duplicité et de mépris, ils éclatèrent. Le ministre de France fut incessamment rappelé de Turin; un corps de dix mille hommes de troupes françaises se joignit au marquis de la Mina, qui commandait sous Don Philippe dans la