<21>rivière de Gênes. La Mina, pour forcer les passages du Piémont, tenta de pénétrer par Fort-Dauphin, mais le roi de Sardaigne l'avait prévenu : il s'y était retranché, et occupait deux forts qui sont sur des collines à droite et à gauche du passage. Les Savoisiens défendirent si vigoureusement cette gorge, que les Français et les Espagnols, repoussés de tous côtés, se retirèrent en Dauphiné, après avoir perdu six mille hommes dans cette expédition infructueuse.
La facilité qu'eut la cour de Vienne à faire entrer le roi de Sardaigne dans son alliance, lui persuada qu'elle pourrait se procurer un avantage semblable en Russie, pour fortifier par son assistance ce qu'elle appelait la bonne cause. La France le sut, et renvoya le marquis de La Chétardie à Pétersbourg, pour s'opposer aux desseins de ses ennemis. Cet envoyé, qui par son adresse avait placé Élisabeth sur le trône, croyait de recevoir dans sa mission des marques de reconnaissance de cette cour : il n'en emporta que des témoignages d'ingratitude. Ce pays était plein de fermentation; tant de souverains déposés avaient indisposé ceux des grands qui avaient tenu à leur fortune : il ne manquait qu'un chef à la rébellion pour la faire éclater. Les puissances qui voulaient à toute force des secours de la Russie, et qui ne pouvaient les obtenir, profitèrent de ces germes de mécontentement qui commençaient à fermenter, pour tramer contre l'Impératrice une conspiration qui, par bonheur pour cette princesse, fut découverte. Pour développer cette dangereuse intrigue, il faut se rappeler que la cour de Vienne avait vu avec chagrin la catastrophe qui perdit le prince Antoine de Brunswic et son épouse : c'était assez que la France eût travaillé à cette révolution pour la rendre odieuse, d'autant plus qu'il était à présumer que l'impératrice Élisabeth n'oublierait pas le service que la France lui avait rendu, et marquerait plus de prédilection pour cette puissance que pour l'Autriche, surtout à cause de la proche parenté de la reine de Hongrie avec la famille détrônée. Cette supposition était suffisante pour que le ministère de Vienne se crût en droit de tout entreprendre pour travailler à la ruine de l'impératrice de Russie. Le marquis de Botta Adorno, envoyé de la reine de Hongrie à Pétersbourg, avait des instructions secrètes pour our-