<22>dir cette trame : il était dans cette cour comme un levain qui aigrissait les esprits de ceux qu'il fréquentait; il ameuta des femmes, et s'associa avec des personnes de tout rang et de tout caractère; il ajouta la calomnie à la trahison, en assurant de la protection du roi de Prusse ceux qui travailleraient pour son beau-frère et pour son neveu le jeune empereur détrôné. L'intention du marquis de Botta en se servant du nom du Roi dans celte intrigue, était de brouiller ce prince avec la Russie, en cas que la conjuration fut découverte. Elle le fut effectivement; mais le knout apprit à l'impératrice de Russie que Botta en était l'auteur. La chose se découvrit par un Russe étourdi et plein de vin, qui tint quelques propos séditieux dans un des cafés de Pétersbourg. Il fut arrêté par la police : lui et ceux de ses complices qu'on arrêta, avouèrent tout par la crainte des tourments. On arrêta quarante personnes à Moscou, dont la déposition fut semblable à celle des premiers. La comtesse Jagusinskya eut la langue coupée, la femme d'un Bestusheff frère du ministre, fut reléguée en Sibérie, et un grand nombre de personnes durent les jours infortunés qu'elles passèrent dans la suite, aux séductions du marquis de Botta. Ce ministre avait eu la précaution de se faire relever par un nouveau ministre avant que la conjuration dût éclater, pour ne point exposer sa personne et son caractère, au cas que les choses ne réussissent point. Il était accrédité à la cour de Berlin lorsque la conjuration se découvrit. Le Roi, ayant appris ce qui se passait en Russie, lui fit défendre la cour, et il se joignit à l'impératrice de Russie pour en demander satisfaction à la reine de Hongrie, parce que Botta avait également offensé l'Impératrice et le roi de Prusse. Ce qu'il y avait d'odieux dans la conduite de Botta rejaillit en partie sur sa cour. Si les Français donnèrent l'exemple d'une semblable entreprise, les Autrichiens ne devaient pas les imiter. Que deviendrait la sûreté publique et celle des rois mêmes, si l'on ouvrait la porte aux


a La femme du comte Jagusinsky, mort en 1736, était née comtesse Anne Golowkin. Elle se remaria le 27 mai 1743 avec Michel Riumin comte Bestusheff. C'est elle qui fut si cruellement punie pour avoir pris part à la conspiration contre l'Impératrice. Aucune autre comtesse Bestusheff ne figure dans cette affaire.