<31>Bestusheff par un ministre mieux intentionné, on eut recours à la clef d'or pour ouvrir un cœur à portes de fer : ce fut là la rhétorique dont M. de Mardefeld se servit jusqu'à l'année 1745 pour tempérer la mauvaise volonté d'un homme aussi mal intentionné. Tous ces faits que nous venons de détailler, montrent bien que le roi de Prusse n'avait pas entièrement réussi dans ses intrigues, et que ce qu'il put obtenir de la Russie ne répondait pas entièrement à ses espérances. C'était toujours beaucoup que d'avoir assoupi pour un temps la mauvaise volonté d'une puissance aussi dangereuse; et qui gagne du temps a tout gagné.
On fit encore un essai pour associer les princes de l'Empire. On pouvait compter sur le landgrave de liesse, sur le duc de Würtemberg, sur l'électeur de Cologne et l'Électeur palatin; on avait ébranlé l'évêque de Bamberg; mais il fallait acheter leur assistance : point d'argent, point de prince d'Allemagne. La France ne voulut point prêter l'oreille aux subsides qu'il lui en eût coûté, et la chose manqua une troisième fois.
Il aurait été à souhaiter qu'on eût pu s'entendre avec la cour de Saxe; mais on y rencontra plus d'obstacles que partout ailleurs. Le roi de Pologne était indisposé de ce que la paix de Breslau ne l'avait pas mis en possession de la Moravie; il croyait conquérir des provinces à coups de plume. Il était jaloux que la maison de Brandebourg eût gagné la Silésie, et qu'il n'eût point profité par cette guerre : il croyait ses prétentions sur la succession de Charles VI les mieux fondées; il enviait la couronne impériale à l'électeur de Bavière, et il détestait les Français, qu'il accusait de l'avoir trompé. Des dispositions aussi favorables n'échappèrent pas à la cour de Vienne. Ce négociateur féminin, la vieille demoiselle Kling,a était toujours à Dresde; elle ménageait si bien les esprits du Roi, de la Reine, du comte Brühl et du confesseur, qu'elle les amena à la résolution de s'allier avec la reine de Hongrie. Le roi d'Angleterre acheva d'affermir le comte de Brühl dans cette résolution, en lui faisant présent d'une terre de la valeur de quatre-vingt mille écus, située dans le comté de Mansfeld. Dès lors la négociation ne rencontra plus d'obstacles : on conclut une alliance défensive entre l'Autriche, l'Angleterre et la Saxe,
a Voyez t. II, p. 120.