<56>vait : le Roi, en l'apprenant, vola à son secours avec quatre-vingts escadrons et seize bataillons; mais M. de Hacke avait vaillamment repoussé les ennemis, et s'était dégagé lui-même avant que le secours pût le joindre. Le projet sur Béraun manqua ainsi, et M. de Batthyani fit transporter en hâte son magasin de cette ville à Pilsen. Il aurait fallu sans doute retourner à Béraun, chasser M. de Batthyani de Pilsen, et lui enlever son magasin : c'était le moyen d'empêcher l'armée autrichienne de profiter des vivres que M. de Batthyani avait eu le temps d'amasser; de rejeter le prince de Lorraine dans la Haute-Autriche; et de gagner la fin de cette campagne, en demeurant en possession de la Bohême : mais les vivres de l'armée étaient mal administrés, et les Prussiens manquaient d'un M. de Séchelles.

Le 10 au soir, on ouvrit la tranchée devant Prague à trois endroits différents; savoir : au plateau de Saint-Laurent, à Bubenetsch vis-à-vis du moulin de la basse Moldau, et à la montagne de Ziska. Le comte de Truchsess commandait la première attaque; le margrave Charles, la seconde; la troisième était sous la direction du maréchal de Schwerin. On ne perdit rien la première nuit. Le lendemain, le maréchal fit attaquer le fort de Ziska en plein jour, et l'emporta après y avoir fait jeter des bombes; et il prit tout de suite deux petites redoutes qui étaient derrière le premier, et que les Français, qui les avaient construites, appelaient des nids à pie. Le Roi se trouvait précisément à la tranchée de Bubenetsch; il en sortit avec beaucoup d'officiers, pour voir comment tournerait l'attaque du Ziska. Les ennemis aperçurent cette foule de monde, tournèrent leur canon dessus, et un malheureux coup emporta le prince Guillaume,a frère du margrave Charles, le même qui avait si vaillamment combattu à Mollwitz pour la gloire de sa patrie. On fit avancer incontinent les batteries, de sorte qu'elles battaient en brèche la courtine qui est entre


a Frédéric-Guillaume, margrave de Brandebourg, général-major et commandeur du premier bataillon de la garde, né le 28 mars 1715, fut tué le 12 septembre 1744 : c'est le seul officier qui périt à l'attaque de Prague. Ce prince était le troisième fils du margrave Albert-Frédéric, et par conséquent le petit-fils du Grand Électeur : il se trouvait être ainsi le frère cadet du margrave Frédéric, dont nous avons mentionné la mort, t. II, p. 85.
     Le margrave Charles, né en 1705, était alors lieutenant-général.