<74>lui quarante-deux pièces de campagne autrichiennes, à la place du gros canon qu'il fallait abandonner. Ce fut le 26 de novembre que la garnison sortit de Prague. M. d'Einsiedel avait si mal pris ses précautions,b que ses troupes défilaient encore par la porte Saint-Charles, que déjà quatre cents pandours s'étaient, d'un autre côté, introduits dans la ville. Ces Hongrois attaquèrent l'arrière-garde : M. de Rottembourg, qui s'y trouvait, fit tirer sur eux quelques canons chargés à mitraille, qui les continrent. Cette garnison arriva le 30 à Leitmeritz : on s'y arrêta quelques jours, pour s'y pourvoir de pain et de provisions. Quand M. d'Einsiedel arriva à Leipa, il apprit que les Saxons voulaient lui disputer le chemin de la Silésie; car le prince de Lorraine n'avait suivi le Roi que jusqu'à Nachod, d'où il avait pris la route de la Moravie, et les Saxons, celle des cercles de Bunzlau et de Leitmeritz. Il y eut quelques escarmouches en chemin avec les troupes légères des ennemis, mais peu importantes. Comme il arriva à Hochwald, bourg situé à deux milles de Friedland et à trois des frontières de la Silésie, il aperçut un gros corps, et apprit par des transfuges et des espions que c'était une partie du corps saxon aux ordres du chevalier de Saxe, auquel deux mille grenadiers autrichiens s'étaient joints. M. d'Einsiedel, qui ne s'était jamais trouvé en pareil cas, perdit entièrement contenance; il fut longtemps indécis s'il attaquerait ces Saxons, qui s'étaient fait des retranchements avec de la neige entassée, ou s'il traverserait la Lusace pour rentrer en Silésie. Les ennemis avaient fait de si grands abatis sur le chemin de Friedland, qu'il était devenu impraticable dans cette saison. M. de Rottembourg, voyant que l'incertitude de M. d'Einsiedel laisserait périr les troupes de froid et de misère, fit reconnaître les chemins de la Lusace, et prit en même temps la résolution d'attaquer le chevalier de Saxe, en se chargeant de l'événement. Un capitaine, nommé Kottwitz, Saxon de naissance, déserta la nuit, et avertit le chevalier des desseins de Rottembourg. Rottembourg se voyant trahi, profita de la trahison même : il se mit le lendemain de bon matin en marche par sa
b Le lieutenant-général d'Einsiedel fut déclaré innocent le 16 février 1745, par jugement d'un conseil de guerre.