<117>avec M. Daun. Pour cet effet, on construisit un pont sur la Moldau près de Seltz, et le Roi le passa à la tête d'un détachement de vingt bataillons et de quarante escadrons; c'était le 5 de mai. Ce prince eut le temps de reconnaître la position des ennemis : il trouva le front de M. de Browne d'un trop difficile abord pour l'attaquer, et il s'aperçut qu'en tournant la droite des ennemis, le terrain présentait un aspect plus avantageux pour un engagement.

Le lendemain, de grand matin, les deux armées prussiennes se joignirent à la portée du canon des ennemis, et l'on résolut de les attaquer tout de suite. La gauche des Autrichiens s'appuyait sur la montagne de Ziska, et se trouvait protégée par les ouvrages de Prague; un ravin de plus de cent pieds de profondeur couvrait son front; la droite se terminait sur une hauteur au pied de laquelle se trouve le village de Sterboholy. Pour rendre plus égal le combat qu'on méditait, il fallait contraindre M. de Browne d'abandonner une partie de ces montagnes et de longer dans la plaine. A cette fin, le Roi changea son ordre de bataille : l'armée avait défilé en colonnes rompues; on la mit sur deux lignes, et on la fit marcher par la gauche, en prenant le chemin de Potschernitz. Dès que M. de Browne s'aperçut de ce mouvement, il prit sa réserve de grenadiers, sa cavalerie de la gauche et sa seconde ligne d'infanterie, avec lesquelles il côtoya les Prussiens, en tenant une ligne parallèle; c'était précisément ce qu'on voulait. L'armée du Roi poussa à Piechowitz par des défilés et des marais qui séparèrent un peu les troupes; la cavalerie prussienne fila au travers de ce village, où elle trouva une plaine bornée par un étang, qui lui présentait précisément la distance qu'il lui fallait pour se former, et, emboîtée entre ce village et cet étang, ses flancs se trouvaient à l'abri d'insulte; elle attaqua vigoureusement la cavalerie autrichienne; après trois charges consécutives, elle l'enfonça et la mit entièrement en déroute. A peine dix bataillons de la gauche étaient formés, avant que la seconde ligne pût les joindre, qu'ils attaquèrent l'ennemi avec plus de précipitation et de courage que de prudence; ils essuyèrent un feu d'artillerie prodigieux, et furent repoussés, mais certainement pas avec honte; car les plus braves officiers et la moitié des bataillons étaient couchés sur le carreau. Le maréchal de Schwerin, qui malgré