<135>Dès que le Roi fut informé de la perte de Gabel, il se proposa d'évacuer Leitmeritz, pour retourner en Saxe. La ville de Leitmeritz était vide; les munitions de guerre et de bouche étaient déjà arrivées à Dresde, et comme il n'y avait point de temps à perdre, le prince Henri passa l'Elbe; après qu'il eut rejoint le Roi, l'armée alla se camper entre Sulowitz et Lowositz. M. de Nadasdy, qui avait suivi l'arrière-garde de S. A. R., attaqua les grand'gardes du camp; on le reçut vertement; il fut repoussé avec perte, et repassa promptement l'Elbe. Les jours suivants, l'armée se replia sur Linay, de là sur Nollendorf et sur Pirna. Un détachement de deux cents hommes de nouvelles levées qui gardait le Schreckenstein, fut attaqué et pris par M. Loudon; les postes d'Aussig et de Tetschen furent évacués sans perte. Le Roi laissa le prince Maurice à Gieshübel; il lui donna quatorze bataillons et dix escadrons pour défendre cette gorge, et se mit en marche avec le reste de ses troupes pour joindre le prince de Prusse à Bautzen. Ce prince, qui était devenu malade, quitta l'armée et ne fit depuis que languir. Le Roi s'avança d'abord avec un détachement de Bautzen au Weissenberg; il en délogea M. de Beck, qui se replia vers Bernstadt. Les arrangements qu'il fallut faire pour rétablir l'ordre dans les vivres et préparer de nouveaux caissons, arrêtèrent le Roi quinze jours.

Ce prince était pressé par les progrès des Français à sa droite et des Russes à sa gauche; il était obligé de détacher; ce qui lui inspira le dessein de marcher aux Autrichiens, et d'essayer si l'on pourrait s'en délivrer, avant que de s'affaiblir par des détachements. Il se mit en marche le 15 pour Bernstadt; le Roi menait la colonne de la gauche, le prince de Brunswic celle de la droite. Ils pensèrent entourer M. de Beck sur une montagne près de Sohland, et ce partisan ne se sauva qu'en perdant une partie de son monde. On apprit à Bernstadt qu'un détachement des ennemis s'assemblait à Ostritz; M. de Wernera y fut aussitôt envoyé; il manqua de peu M. de Nadasdy, dont il prit le bagage et les troupes qui l'escortaient. On trouva parmi ses papiers des lettres


a Le colonel Paul de Werner devint général-major le 17 septembre 1758, et lieutenant-général le 20 février 1761. De 1757 à 1785, il fut chef du régiment des hussards bruns, no 6.