<159>les Impériaux déconcertés : au lieu qu'en demeurant dans l'inaction, M. de Nadasdy ne pouvait pas manquer à la longue de prendre une place qui n'avait point de secours à espérer; et toutes ces troupes ennemies, venant à fondre sur les Prussiens, auraient enfin forcé les retranchements de la Lohe. Le malheur voulut que ce prince ne comprît pas la force de ces raisons; les généraux le déterminèrent cependant un jour à tenter cette entreprise; il sortit de son camp, et battit les troupes légères qui couvraient le flanc droit des Autrichiens : alors, au lieu d'attaquer l'armée et de la pousser dans l'Oder, comme cela serait arrivé, son incertitude, sa timidité, le peu de confiance qu'il avait en lui-même, et la crainte d'une entreprise dont l'événement n'est jamais d'une sûreté évidente, le retinrent; il crut en avoir fait assez, et il ramena les troupes dans ses retranchements.

Le Roi arriva à Naumbourg-sur-le-Queis le 24 de novembre; il y apprit la victoire des Autrichiens sur le prince de Bevern, et la perte de Breslau. Tout ce dont on avait averti le prince de Bevern était malheureusement arrivé trop exactement : M. de Nadasdy avait joint le prince de Lorraine et le maréchal Daun, et les ennemis, impatients d'achever leur conquête, ne perdirent point de temps pour mettre leur projet en exécution. La nuit du 21 au 22 de novembre, ils construisirent devant le front des Prussiens quatre grandes batteries de grosses pièces de canon; les emplacements qu'ils prirent étaient entre Pilsnitz et Gross-Mochber. Le prince de Bevern se contenta d'être spectateur de cet ouvrage, qu'il leur laissa achever tranquillement, tandis que ces apprêts annonçaient les desseins du maréchal Daun sur les retranchements prussiens. M. de Nadasdy longea la Lohe et se forma vers Gabitz; le prince de Bevern crut que c'était pour lui venir à dos, quoique cela fût difficile, et il s'affaiblit encore par un détachement, qui marcha à Gabitz aux ordres de M. de Zieten, pour s'opposer de ce côté aux entreprises des ennemis. Le front du camp prussien derrière la Lohe était couvert par des redoutes ouvertes par les gorges, mal placées, dont quelques-unes même étaient dominées de l'autre rive. Le prince de Bevern n'avait pas même eu l'attention d'y faire distribuer suffisamment de canon; la plupart de son artillerie demeura dans un retranchement qu'il avait