<203>comme si effectivement on avait dessein de passer cette rivière dans ces environs; en même temps, le Roi renforça la garnison de Cüstrin de quatre bataillons. Il avait envoyé M. de Canitza à Wrietzen, pour amasser tous les bateaux qui se trouvaient dans cette partie sur l'Oder. Tandis que l'armée marchait, la nuit du 23,b en remontant la rivière jusqu'à Güstebiese, où elle fut jointe par M. de Canitz, qui amena suffisamment de bateaux pour la construction du pont, on se donna tant de soins pour l'achever, que toute l'armée l'eut passé à midi; elle continua sa marche jusqu'au village de Clossow, où elle se campa, et par cette position, elle coupa déjà le corps de M. de Fermor de celui de M. Romanzoff, qui était du côté de Schwedt, où il avait dessein de passer l'Oder.
Le 24, l'armée se campa à Dermietzel vis-à-vis de M. de Fermor, qui, sur les mouvements des Prussiens, avait levé le siége de Cüstrin, et s'était fait joindre par la division de M. Czernichew, avec laquelle et le gros de ses troupes il prit une position entre les villages de Quartschen et de Zicher, ayant un ruisseau marécageux devant son front; ces troupes campaient en carré, selon l'usage que le maréchal Münnich avait suivi en faisant la guerre aux Turcs dans la Petite-Tartarie. Le même jour que l'armée prussienne arriva, le Roi s'empara du moulin de Damm et du pont qui passe le ruisseau; son avant-garde prit possession de la forêt de Massin, par laquelle il fallait passer pour tourner le camp des ennemis.
Le lendemain, l'armée déboucha sur quatre colonnes dans la plaine, près du village de Batzlow; les ennemis avaient laissé entre ce village et Cammin le gros de leur bagage sous peu d'escorte; si l'on avait été moins pressé de s'expédier, on aurait pu le leur enlever sans peine, et les obliger par quelques marches à quitter le pays; mais il fallait en venir à une décision, dont on devait tout attendre, vu la disposition bizarre que l'ennemi avait donnée à sa bataille. La marche de l'armée se continua donc sur Zorndorf, où nous nous proposions d'attaquer la face opposée du
a Hans-Guillaume de Canitz, né en 1693, devint lieutenant-général le 22 janvier 1758.
b La nuit du 22 au 23 août.