<21>trice Élisabeth contre le Roi. Ils lui persuadèrent que ce prince avait tramé un complot contre sa vie, pour élever le prince Iwan sur le trône. L'Impératrice, qui était d'un caractère indolent et facile, les en crut sur leur parole, pour s'épargner la peine d'examiner la chose; et elle fit donner un philtre au prince Iwan, qui lui dérangea les organes du cerveau, et elle conçut pour le Roi une haine irréconciliable. La France n'avait dans ce temps aucun ministre à Pétersbourg; celui que la Suède y entretenait, était plus russe que suédois, et par conséquent peu propre à servir le Roi; de sorte qu'il n'y avait aucune voie pour parvenir à l'Impératrice, et pour la tirer de l'erreur où la jetaient le ministre d'Autriche et ses créatures. La cour de Vienne, satisfaite des sentiments de haine et d'animosité dont elle avait rempli la cour de Pétersbourg pour la Prusse, était trop habile pour pousser les choses plus loin; elle se contenta d'avoir disposé les esprits à la rupture, mais elle n'en voulut pas précipiter l'événement, pour achever ses arrangements intérieurs, et pour attendre qu'une occasion favorable lui permît de mettre au jour ses vastes projets. C'était ainsi que l'Impératrice-Reine agitait toute l'Europe par ses intrigues, et tramait une conspiration sourde contre la Prusse, que le premier événement important devait faire éclater.
Cependant les différends que la Suède avait avec la Russie pour les frontières de la Finlande, furent terminés à l'amiable; mais vers la fin de l'année 1756 il se fit dans ce royaume une espèce de révolution, dont nous ne saurions nous dispenser de parler en peu de mots, parce que ses suites influèrent dans les affaires générales de l'Europe. Voici ce qui y donna lieu. La cour s'était depuis longtemps brouillée avec les sénateurs du parti français, à cause d'une place de général-major vacante que le Roi destinait à M. de Lieven, et le sénat, à M. de Fersen; le sénat l'emporta. La cour, vivement piquée de cet affront, contraria depuis dans toutes les occasions le parti français. Les comtes de Bonde et de Horn, et le sieur de Wrangel, avec nombre de seigneurs des premières familles du royaume, attachés au parti de la cour, la flattèrent de lui procurer la supériorité à la diète en faisant élire un maréchal qui fût entièrement à sa dévotion. Cependant l'événement tourna d'une manière toute contraire, et