<217>Markersdorf. Le Roi fut obligé de rester dans ce camp pour donner quelques jours à l'arrangement des vivres, de sorte que l'armée ne put se mettre en marche que le 30. Les troupes décampèrent de nuit, pour qu'elles eussent achevé de passer la Neisse avant que l'ennemi en pût être informé. On trouva M. Loudon embusqué dans le bois de Schönberg. Les Prussiens faisaient cette marche légèrement, parce que les bagages et les vivres avaient pris la route de Naumbourg-sur-le-Queis. L'arrière-garde fut toutefois attaquée proche de Schönberg, et ce ne fut qu'une bataille durant toute la route; M. Loudon y était encouragé par un renfort de douze mille hommes que le maréchal Daun lui avait envoyé; de son côté, S. A. R. le prince Henri, qui commandait cette arrière-garde, fit de si bonnes dispositions, soutint les brigades réciproquement, en posta d'autres si à propos pour recevoir celles qui se retiraient pour poursuivre leur chemin, qu'il n'y eut que du temps de perdu. A la vérité, M. de Bülow,a lieutenant-général, et environ deux cents soldats furent blessés; s'il y eut d'ailleurs quinze hommes de tués, ce fut le bout du monde. Arrivé à Lauban, il fallut préparer des ponts sur le Queis; ce qui fit perdre un jour.

Le 1er de novembre, l'armée prit la route de la Silésie; on se prépara surtout à bien recevoir l'ennemi à l'arrière-garde, car sa force se trouvait assez considérable pour mériter cette attention. Le camp prussien avait ses deux ailes sur deux croupes de montagnes qui aboutissaient chacune vers le Queis; plus on approchait de Lauban, plus les hauteurs dominaient celle du camp. On forma sur chacune de ces hauteurs une arrière-garde séparée. Le Roi se trouvait à la croupe de la droite, le margrave,b à celle de la gauche; des hussards furent placés dans le fond, entre ces deux corps d'infanterie, pour agir selon le besoin. Derrière ces premiers corps, des brigades d'infanterie et d'artillerie, en échelons, occupaient les hauteurs dominantes, pour que chaque corps qui


a Jean-Albert de Bülow, né en 1708, général-major d'infanterie depuis 1757, ne fut nommé lieutenant-général que le 6 février 1760; mais il est mentionné ici avec ce titre, parce qu'il l'avait lorsque le Roi écrivit l'histoire de la guerre de sept ans.

b Il est ici question du margrave Charles, qui fut nommé général de l'infanterie le 24 mai 1747.