<118>ils sortaient, et leur fit trois cents prisonniers. Cette cavalerie s'enfuit à Jauer à la débandade, et il n'y eut qu'un régiment qui joignit M. de Buturlin, parce qu'il avait passé le premier. Le hasard fit que les Cosaques mêmes aidèrent à battre les Autrichiens dans cette occasion. Les dragons autrichiens qui avaient eu la tête de la colonne, étaient habillés de bleu; les Russes les prirent pour des Prussiens, et tandis que M. de Reitzenstein les attaquait, les Cosaques leur tombèrent en flanc. Notre cavalerie, victorieuse des Autrichiens, poussa les Russes à leur tour jusque sous le camp où M. de Buturlin s'était retranché. Cette armée occupait le terrain depuis le village de Koischwitz jusqu'à celui de Kunzendorf; elle avait passé l'Oder à Leubus, et avait travaillé avec beaucoup de diligence à se fortifier dans ce poste.

Les raisons que le Roi avait de ne point attaquer les Russes, étaient toujours les mêmes. Leur armée se trouvait postée de façon que ce n'aurait été qu'en sacrifiant beaucoup de monde qu'on aurait pu la forcer dans ce terrain avantageux, et nous n'avions pas du monde de trop. Ce qui avait suivi le Roi, faisait en tout vingt-quatre bataillons et cinquante-huit escadrons, parce que le gros était demeuré avec le margrave Charles au camp de Leipe, pour conserver le dos libre aux troupes du Roi, et pour observer en même temps de plus près les mouvements des Autrichiens. Cependant les distances n'étaient pas assez considérables pour que ces deux corps ne pussent se joindre en moins de deux heures. M. Loudon était trop éloigné de Leipe pour attaquer le margrave à l'improviste; quoi qu'il arrivât, celui-ci avait le temps d'avertir, et d'attendre des secours. Pour les Russes, leur lenteur ordinaire et leur peu de penchant aux entreprises vigoureuses donnait un temps suffisant pour qu'en cas de besoin le Roi pût attirer à soi le margrave Charles. Sa Majesté prit son camp entre Klein-Wandris et Wahlstatt; elle le fit retrancher avec soin, pour ne point être pris au dépourvu, et l'on raccommoda une vieille redoute au Wirchenteich, pour assurer par là d'autant mieux la communication des deux armées prussiennes.

Le lendemain, un nouveau camp se présenta derrière Jauer. Il ne suffisait pas de savoir que c'étaient des Autrichiens; il fallait pénétrer à quel but ce corps s'était tourné de ce côté. Pour cet