<143>joignait l'éloignement des lieux; ce qui absorba du temps. Néanmoins la cour de Pétersbourg fut convaincue des procédés iniques de l'Empereur, et elle comprit que ce prince, qui ne devait être que le chef de l'Empire, aspirait à s'en rendre le tyran.
On négociait donc ainsi dans toutes les cours de l'Europe, tandis qu'à Vienne on s'apercevait, par les mémoires que le baron de Riedesela présentait au nom de la Prusse, que, touchant la succession de Bavière, on raisonnait à Berlin sur des principes tout opposés à ceux de la cour impériale. Cette cour en conçut des soupçons, et se doutant que les choses pourraient en venir à une brouillerie ouverte, dès le commencement de mars elle résolut de rassembler ses forces en Bohême. Les ordres furent donnés aux régiments d'Italie, à ceux de Hongrie et à ceux de la Flandre de hâter leur marche pour s'y rendre. Or, dès qu'une armée aussi nombreuse s'assemble sur les frontières d'une province, la sûreté de l'État exige qu'on se mette également en force, pour ne pas recevoir la loi de son voisin. Ces considérations engagèrent le Roi à mettre ses troupes en mouvement pour former deux armées, chacune de quatre-vingt mille hommes. L'une, sous les ordres du prince Henri, fut destinée à s'assembler aux environs de Berlin, pour être à portée de joindre promptement les Saxons, au cas que l'Empereur tentât de faire une invasion en Saxe. L'autre armée, à la tête de laquelle le Roi avait résolu de se mettre, avait son rendez-vous en Silésie. Sa Majesté partit de Berlin, le 4 d'avril,a pour Breslau, d'où elle se rendit à Frankenstein, où les troupes silésiennes arrivèrent le même jour. Cela formait un corps de trente mille hommes, avec lesquels il fallait établir une défensive pour attendre que les Prussiens, les Poméraniens, et ceux de la Marche électorale eussent le temps de les joindre. Dans cette vue, on prépara un camp retranché dans le comté de Glatz, sur les hauteurs de Pischkowitz, dont la gauche était flanquée par les canons de la forteresse et couverte par le
a Jean-Hermann baron de Riedesel, depuis le 8 août 1773 envoyé de Prusse auprès de la cour impériale. Après la paix de Teschen, il y fut de nouveau accrédité le 27 juillet 1779. Il mourut dans le village de Hitzing, près de Vienne, le 20 septembre 1785.
a Le 6 avril.