<161>amasser des magasins, et que le corps que les Impériaux avaient sur cette frontière, était même inférieur à celui des Prussiens, il parut assez probable que la tranquillité se maintiendrait de ce côté-là pendant l'hiver. Dès lors le Roi eut la liberté de tourner toutes ses pensées vers la Haute-Silésie; d'ailleurs, le froid commençait à se faire sentir assez vivement dans les montagnes de la Bohême : il gelait toutes les nuits. Les Autrichiens n'avaient aucun corps d'armée dans le voisinage. Toutes ces considérations parurent suffisantes pour lever le camp, et mettre les troupes qui devaient défendre la frontière en cantonnement entre Landeshut, Griissau, Hirschberg, Schmiedeberg et Friedland. Elles consistaient en vingt bataillons et trente escadrons, dont le général Ramina avait le commandement. Cette position était la même que le Roi avait occupée en l'année 1759. Seize bataillons et quinze escadrons partirent à part pour se rendre dans la Haute-Silésie; le Roi les joignit à Neisse, se mit à leur tête et marcha à Neustadt. Les raisons de ce mouvement étaient les suivantes, savoir : le dessein d'attirer la guerre en Moravie comme le Roi l'avait toujours voulu; le Prince héréditaire occupait Troppau; les ennemis avaient Jagerndorf, et pouvaient de là le couper de Neisse et de Cosel. C'était donc une nécessité d'occuper Jagerndorf, pour assurer, par cette position, la chaîne des quartiers d'hiver derrière l'Oppa. On était obligé, d'ailleurs, de prendre des établissements solides dans la Haute-Silésie, pour se mettre en état de faire, le printemps suivant, les plus grands efforts en Moravie. Les troupes du Roi chassèrent sans peine les Autrichiens de Jägerndorf, et l'on s'occupa dès lors à fortifier la ville, la montagne de la Chapelle, et les villages les plus exposés aux insultes de l'ennemi. Le Prince héréditaire en fit autant à Troppau, et ces deux villes, par les fortifications qu'on y ajouta, devinrent de bonnes places à l'abri de toute insulte. Dès la mi-novembre, ces ouvrages étant en assez bon état, le Roi se rendit à Breslau, tant pour prendre des arrangements pour la campagne prochaine,
a Frédéric-Ehrentreich de Ramin (t. V, p. 218), né dans la Marche-Ukraine en 1710, devint général-major au mois de mars 1759, et en 1767, lieutenant-général et chevalier de l'Aigle noir.