<162>que pour veiller aux négociations, qui commençaient à prendre une tournure assez intéressante.
N'ayant pas voulu rompre le récit d'une campagne stérile en grands événements, nous croyons devoir reprendre maintenant le fil des affaires politiques. La cour de Pétersbourg était celle qui intéressait le plus, parce que c'était d'elle uniquement qu'on pouvait attendre des secours réels. L'impératrice de Russie s'était engagée d'assister le Roi sitôt que ses différends avec la Porte ottomane seraient vidés. Le Roi, qui voulut mettre l'Impératrice dans le cas d'accomplir sa promesse, s'était, par une suite de la bonne harmonie qui s'établissait entre la France et la Prusse, adressé au ministère de Versailles, afin qu'il se chargeât de la médiation entre les Turcs et les Russes; et les Français avaient réussi à faire consentir la Porte à s'accommoder avec ses ennemis en rendant les vaisseaux russes qu'elle avait pris aux Dardanelles, et à reconnaître le kan des Tartares, protégé par Catherine. A peine ces nouvelles arrivèrent-elles à Pétersbourg, que l'Impératrice, rassurée sur la tranquillité de ses États, et flattée par l'ambition de prendre une part directe aux affaires d'Allemagne, se déclara ouvertement pour la Prusse. Ses ministres, tant à Vienne qu'à Ratisbonne, déclarèrent en substance : « Qu'elle priait l'Impératrice-Reine de donner une satisfaction entière aux princes de l'Empire à l'égard de leurs griefs, et surtout des justes sujets de plainte que leur fournissait l'usurpation de la Bavière, manque de quoi l'impératrice de Russie serait dans l'obligation de remplir ses engagements envers Sa Majesté Prussienne, en lui envoyant le corps de troupes auxiliaires qu'elle lui devait selon la teneur des traités. »
Cette déclaration fit l'effet d'un coup de foudre sur la cour de Vienne. Cet événement inattendu troubla et dérangea sa sécurité hautaine; le prince Kaunitz fut honteux, n'ayant rien prévu, de se voir surpris. Il était bien embarrassé sur qui en rejeter la faute. Son fils, qui était envoyé à Pétersbourg, jeune et sans expérience, s'étant plus occupé de ses plaisirs que des affaires, n'avait point averti sa cour de l'état de la négociation de Constantinople, ni des dispositions où l'impératrice de Russie était pour le roi de Prusse. Joseph, qui désirait ardemment la continuation de la