<175>peine on lui faisait obtenir. On s'expliqua de même à peu près avec celui de Deux-Ponts, en lui rappelant qu'ayant perdu les trois quarts de la Bavière, son prince devait se trouver heureux qu'on lui en restituât les deux tiers, sans compter qu'en sa faveur le Roi renonçait aux droits que la maison de Brandebourg a sur les duchés de Juliers et de Berg. A peine avait-on tranquillisé ces deux ministres, que la marionnette de l'Empereur, l'Électeur palatin, se remit sur les rangs pour produire de nouvelles chicanes. La France en fut indignée, et le ministre de Louis XVI à Munich y parla sur le ton dont Louis XIV s'exprimait durant ses triomphes. Néanmoins ces altercations continuèrent à Teschen, et furent poussées au point que les plénipotentiaires mêmes commençaient à se défier du succès de leur négociation.
Déjà six semaines s'étaient écoulées infructueusement; on en était au 20 d'avril, lorsqu'il arriva de Constantinople à Vienne un courrier avec la nouvelle de la paix conclue entre la puissance ottomane et la Russie. Il ne fallait pas moins qu'un événement aussi important pour fléchir l'âme inquiète et ambitieuse du jeune empereur. Tant que les apparences de guerre entre la Russie et la Porte annonçaient une rupture prochaine entre ces puissances, Joseph n'avait considéré la déclaration de la cour de Pétersbourg en faveur de la Prusse et de l'Empire que comme une ostentation, une vaine bravade, un enchaînement de paroles qui faisait plus de bruit que d'effet, parce que la Russie se trouvait assez occupée en Crimée pour soutenir le kan, son protégé, contre la puissance ottomane, qui voulait le détrôner, et que par conséquent elle n'aurait ni la force ni les moyens de soutenir efficacement la Prusse. Mais le rétablissement de la paix détruisait toutes les espérances dont l'Empereur s'était flatté; il ne pouvait pas se déguiser que la Russie, ayant maintenant les bras libres, était maîtresse d'employer ses forces comme bon lui semblerait; que par conséquent elle pouvait faire marcher un si puissant corps de troupes au secours du Roi, que la Prusse gagnerait par là une trop grande supériorité d'hommes, contre laquelle il serait impossible aux troupes impériales de se soutenir une campagne avec dignité, et à plus forte raison si la guerre venait à traîner en longueur. La paix des Russes doit donc proprement servir d'époque