TESTAMENT DU ROI.
Notre vie est un passage rapide du moment de notre naissance à celui de notre mort. Pendant ce court espace, l'homme est destiné à travailler pour le bien de la société dont il fait corps. Depuis que je parvins au maniement des affaires, je me suis appliqué avec toutes les forces que la nature m'avait données, et selon mes faibles lumières, à rendre heureux et florissant cet État, que j'ai eu l'honneur de gouverner. J'ai fait régner les lois et la justice, j'ai mis de l'ordre et de la netteté dans les finances, et j'ai entretenu l'armée dans cette discipline qui l'a rendue supérieure aux autres troupes de l'Europe. Après avoir rempli ces devoirs envers l'État, j'aurais un reproche éternel à me faire si je négligeais ce qui concerne ma famille; c'est donc pour éviter les brouilleries qui pourraient s'élever entre mes proches à l'égard de mon héritage, que je déclare par cet acte solennel ma volonté dernière.
1o Je rends de bon gré et sans regrets ce souffle de vie qui m'anime à la nature bienfaisante qui a daigné me le prêter, et mon corps aux éléments dont il a été composé. J'ai vécu en philosophe, et je veux être enterré comme tel, sans appareil, sans faste, sans pompe; je ne veux être ni disséqué ni embaumé; qu'on m'enterre à Sans-Souci, au haut des terrasses, dans une sépulture que je me suis fait préparer. Le prince de Nassau, Maurice, a été inhumé de même dans un bois proche de Clèves; si je meurs en temps de guerre, ou bien en voyage, il n'y a qu'à déposer mon