<37>les autres puissances voisines de ce royaume. Cette ouverture, toute cordiale qu'elle était, ne fut point accueillie par la cour de Vienne comme on s'en était flatté. Le prince Kaunitz était trop préoccupé du projet qu'il se préparait à mettre en exécution; il trouvait plus d'avantage dans l'alliance des Turcs qu'il ne croyait en pouvoir espérer d'une alliance avec la Russie. Il répondit donc sèchement que si sa cour avait fait occuper quelques parcelles de la Pologne sur les confins de la Hongrie, ce n'était pas à dessein de les garder, mais uniquement pour obtenir justice sur quelques sommes que la maison d'Autriche réclamait de la République, et qu'il n'avait pas imaginé qu'un objet d'aussi peu de valeur pût faire naître l'idée d'un plan de partage, dont l'exécution serait hérissée de difficultés insurmontables, à cause qu'il était autant qu'impossible d'établir une égalité parfaite entre les différentes portions des trois puissances; qu'enfin un tel projet ne pouvant servir qu'à rendre la situation embrouillée de l'Europe plus critique qu'elle ne l'était, il déconseillait à Sa Majesté Prussienne d'entrer dans de telles mesures. Il ajouta d'un air d'indifférence que sa cour était prête à évacuer les districts que ses troupes avaient occupés, si les autres puissances en voulaient faire autant. Ces derniers mots étaient comme un reproche tacite aux Russes, qui avaient des armées en Pologne; ils visaient également sur le Roi, qui avait tiré un cordon de troupes depuis le pays de Crossen jusqu'au delà de la Vistule, pour garantir ses États de la peste, qui faisait alors en Pologne de grands ravages.
Dans une affaire de cette nature, il ne fallait pas se laisser décourager par des bagatelles. On pouvait prévoir que la cour de Vienne changerait de sentiments sitôt que la Russie et la Prusse seraient bien d'accord ensemble, parce que les Autrichiens préféreraient d'avoir part à ce partage aux risques de tenter les hasards de la guerre contre aussi forte partie. Ajoutez à cela que l'Impératrice-Reine, n'ayant d'allié que la France, ne pouvait alors aucunement compter sur des secours. Pour profiter de combinaisons aussi favorables, le Roi résolut de pousser l'affaire du partage; il observa le silence envers la cour de Vienne, pour lui laisser le temps de réfléchir. En même temps, le comte de Solms fut chargé d'informer les Russes que les ouvertures du traité de partage